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Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeMar 17 Mai - 2:11
Comme d’ordinaire, Beaucœur est plus que ravi de se porter volontaire pour se porter au danger. C’est très courageux de sa part, mais c’est le genre d’affaire où j’ai besoin de quelqu’un de plus fourbe que lui…

Je le regarde, dégage ma gorge, et change légèrement mon accent, pour prononcer une phrase un peu incertaine :

« Depènd. Pòs pas parlar sa lenga ?
Seràs convencants ? »


Lando-Valaisin. J’ai commencé à apprendre la langue de ce pays. Tout comme les barbares de Transgarde, je reste persuadé qu’un duc ne peut pas régner sur une contrée dont il ne prend pas la peine de connaître les usages, et surtout, la langue. Je suis sûr que j’ai totalement écorché leur dialecte, mais je suis fier de mon petit effet d’annonce.

« Vous êtes quelqu’un de reconnaissable, Richard, et mon maréchal. Trop de risque que vous soyez reconnu, et pris.
Mais oui, je suis d’accord, il serait bon d’avoir un proche à nous près de Rattier. Mais je préférerais nommer quelqu’un qui paraisse bien pour un Valaisien, et qui s’assure que Pene-Penac ne parle pas à ses proches dans son propre dialecte. »


Quant à mon connétable, je hoche la tête.

« Malestoit est un félon qui a trahi son contrat, et s’est vendu comme une putain. Il mérite d’être puni. Je pensais que le faire rouer à Raveaux serait un châtiment suffisamment juste.
Remarquez, nous avons encore toute son armée de mercenaires comme prisonniers. Ces hommes sont très loyaux à leur capitaine. Une fois Malestoit entre mes mains, peut-être le Mauranne me fera une offre pour sauver son corps. Ce sera à lui de me convaincre. »
Armarius
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeLun 30 Mai - 22:18
Quelques sourcils se levèrent en entendant le duc de Cahogne parler lando-valaisan, et s'il avait écorché cette langue personne ici n'aurait pu le constater puisque personne ne la parlait.
Annequin ne s'en montra pas offusqué, même s'il aurait voulu dire que ce n'était pas au duc de Cahogne d'apprendre la langue de ses sujets, mais à ses sujets d'apprendre la langue du duc de Cahogne. Il revint à propos de Malestoit :

« Juste le rouer de coups mon seigneur ? Votre grâce est bien miséricordieuse. Ce traître mériterait la mort.
- Mais c'est un maurannais,
intervint Robert de Lescure, un sujet du duc. Il a des droits et mérite un procès pour son acte. Surtout que les Maurannes pourraient mal le prendre si on exécutait l'un d'eux, ce pays est encore bien trop turbulent depuis les révoltes sous votre père.
- Le sénéchal Vilence a montré qu'il savait tenir la région, ce n'est pas la mort d'un mercenaire qui va rallumer les braises.
- Méfions-nous cher cousin. »


Richard Beaucoeur attendait pour parler, un peu déçu de ne pas être autorisé à suivre Pene-Penac.

« Qui alors monseigneur ? Je ne vois personne dans nos rangs qui pourraient passer pour un Valaisien. Et personne ne parle leur dialecte... »
Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeVen 3 Juin - 19:13
Annequin n’a pas compris. Je fronce des sourcils, alors que je le reprends un peu agacé :

« Je parlais de lui faire subir le supplice de la roue. Comme les Anciens faisaient aux criminels de droit commun. Voilà une mort qui lui conviendrait très bien. »

Quant à Lescure, je ne peux que ricaner à ce qu’il prétend.

« Au moment où l’on m’a sacré, on m’a remis la main de justice. Tout le droit et toute la justice émane de moi, et c’est à moi de réparer les torts.
On pourra bien faire un procès à Malestoit, si certains y tiennent — mais pas devant le parlement de Soulans, mais bien ici, dans le Vaujour.
De toute façon, on ne va pas parler de ce qu’on fera avec Malestoit alors qu’on ne l’a pas encore capturé. »


Quant à Beaucœur, il commence un peu à m’agacer.

« Envoyez votre confesseur, le père Arnaud. C’est un chanoine de l’Abbaye Rouge, un homme éduqué et fidèle à la Cahogne — il sera moins insultant pour Pene-Penac d’être chaperonné par un clerc que par un militaire, déjà qu’on va l’entourer de gens d’armes… »
Armarius
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeMar 7 Juin - 18:35
Personne ne ressortit satisfait de ce conseil : d'Annequin, honteux de sa mécompréhension, Lescure mécontent de voir les droits de Malestoit bafoués, et Beaucoeur, déçu de ne pouvoir suivre Pene-Penac et surtout qu'on confit cette tâche à un clerc...
Le lendemain, tôt dans la matinée, on ordonna de lever le camps en faisant se propager la rumeur parmi la soldatesque qu'une armée de renfort menée par Robert Landebroc arrivait au Sud.
Les troupes furent ensuite divisées en deux, une partie se ferait passer pour l'armée du Valais pendant que l'autre allait escorter le duc jusqu'à Noyer-le-Grand, bourg que le maréchal Eustache Brascourt avait prit quelques jours plus tôt...

* * *

Cette fois, Eudes faisait le chemin dans sa belle armure de duc et non déguisé en marchand. Lui manquait aussi de l'aller son fidèle Odilon le Chétif dont l'absence rendait la marche plus ennuyeuse, Beaucoeur, Lescure ou d'Annequin n'avaient pas le même sens de la discussion que l'intriguant chambellan.
Tout le long du chemin jusqu'à Noyer-le-Grand, Charles d'Annequin avait affiché une mine perplexe, trahissant ses préoccupations : il s'était juré de prendre Claujacques afin d'égaler les prouesses de son maréchal de bataille, si jamais Pene-Penac jouait double jeu, il en était fini de son honneur, et un homme tel que lui, pour qui l'honneur est tout, serait obligé de démissionner de son office de connétable.  

Après plus d'une heure de marche, on approcha des courtes remparts de Noyer-le-Grand.
Eustache Brascourt avait préparé la venue du duc et mit l'armée en ordre : des rangées de soldats faisaient une haie d'honneur pour le duc de Cahogne. Au bout du chemin se tenait le maréchal Eustache avec à ses côtés Raymond d'Espeyrac et le Porte-oriflamme Hubert II de Vaudrincourt que le duc avait nommé châtelain de Noyer-le-Grand. Eudes reconnu un autre homme portant un harnois cabossé marqué par les années de bataille : Guillaume IX des Murets. Guillaume, malgré son age et la maladie qui le rongeait, avait tenu à rejoindre l'ost de son suzerain. Eudes le connaissait bien pour avoir fait la croisade avec, mais depuis le retour du duc ils ne s'étaient pas revus.

« Bienvenu monseigneur, accueillit Eustache, je suis heureux de pouvoir vous remettre cette ville qui vous revient de droit. »
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeDim 12 Juin - 14:49
Le plus chiant à déplacer, c’est les prisonniers. On en a fait beaucoup trop. Ce qu’il reste de militaires à Malestoit est en train d’être ballotté en grand groupes, sous la garde de nos soldats ; ça fait des bouches à nourrir, des corps qui peuvent tomber malades, ça nous ralentit et ça nous oblige d’avoir en permanence des hommes pour les surveiller. Je déteste ça. On devrait tous les tuer, j’ai déjà commencé, mais le souci c’est que massacrer des mercenaires, ça risque de rendre les négociations de contrat futures plus compliquées avec des compagnies — alors pour l’instant, j’accepte de me les trimballer.
On pourrait les réengager. Mais sans capitaine pour les diriger, ils risqueraient simplement de se disperser et de se transformer en brigands, or, je n’ai pas envie qu’ils se répandent dans le pays du Vaujour, ou qu’ils passent chez Landebroc. Alors, je me résigne. Leur sort peut bien attendre quelques jours de plus…



Noyer-le-Grand n’est pas loin de notre position. Le siège a été brutal, et bref. Eustache Brascourt est parvenu à s’emparer de la ville à la manière d’un soldat, alors que j’ai pris ma propre ville par trahison — j’ai entendu dire, selon son rapport, que beaucoup de gens ont été tués ici. Difficile d’évaluer les dégâts depuis mon cheval, mais qu’importe ; on m’apporte enfin des bonnes nouvelles.

Je saute de mon cheval quand un page se saisit des rênes de ma bestiole, et je m’avance vers mes officiers.
Guillaume IX des Murets se trouve parmi eux. Je ne peux pas m’empêcher de grincer des dents et de grimacer en le voyant, et malheureusement, ça se voit beaucoup trop sur mon visage, tant ce fut incontrôlable.

J’ai sauvé Arda d’une ville enflammée ; Sire Guillaume était un de ces chevaliers qui s’est transformé en animal ignoble. J’ai vu des sergents portant sa livrée violer des femmes et fracasser des enfants contre la pierre, et lui-même a anéanti un temple païen dans lequel les infidèles s’étaient réfugiés. Il a fallu que j’envoie mes propres hommes pour sauver le plus possible les innocents de la cité, en donnant l’ordre à mes troupes de tuer quiconque envahirait des lieux de cultes Sanlars — cet ordre ne m’a pas rendu très populaire envers les croisés, qui l’ont trouvé complètement incompréhensible. C’est probablement aussi ce qui m’a pressé à faire la paix avec les émirs Sanlars, une paix qu’a eu énormément de mal à accepter tant Lothaire que nos alliés du Ponant. Pourtant, je suis le premier chef des croisades qui en un siècle a réussi à gagner du terrain et sécuriser les États d’Orients, mais évidemment, tout le monde ne retient que l’objectif de massacrer les infidèles avec l’aide de Dieu, jamais la pensée stratégique derrière.
C’est un bon chevalier, Guillaume. Mais des bons chevaliers, j’en ai des dizaines. Des bons stratèges, je n’en ai pas beaucoup.


Peu importe. Je m’approche de Hubert, et lui donne une poignée de main. Puis je m’approche d’Eustache, et l’attrape dans mes bras brièvement.

« Excellent travail, mon frère. Je savais que je pouvais compter sur toi. »

J’aime bien Eustache. Et surtout, c’est important de le montrer à tout le monde ; recevoir une embrassade d’un duc, c’est pas mal pour le prestige.
Je m’arrête devant le sire Guillaume. Je fronce des sourcils, et perd ma mine réjouie. Malgré tout, je lève ma main, pas pour la serrer comme avec Hubert — mais pour qu’il l’embrasse, comme un vassal doit faire avec son suzerain.

« Messire. Je vous revois donc. »

Il a quitté la croisade bien avant moi, pour retourner sur ses terres. Ce porc était bien satisfait de son ravage et des meurtres qu’il a commit, et surtout de l’énorme butin qu’il a pu accumuler. Mais rares sont les croisés qui demeurent bien longtemps dans le Ponant. Personnellement, j’y ai été cinq années, et je ne pense qu’au jour où je pourrai y retourner.

« Comment va Pierre ? Il ne vient pas saluer son porteur de lance ? »

Son fils aîné m’avait laissé un meilleur souvenir ; nous faisions partie du même conroi quand on était jeunes et qu'on allait de tournoi en tournoi. Lui et moi avions une personnalité bien plus similaire. Si je n’ai jamais aimé le père, mon amour pour le fils a rendu les relations entre nous deux plus évidentes.
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeJeu 23 Juin - 19:01
Guillaume des Murets posa un genou à terre avant de prendre la main du duc pour l'embrasser. Il était la figure du parfait chevalier, tenant la vassalité pour la plus haute de ses fonctions.
Il resta ainsi un moment, comme pour appuyer sa soumission, craignant de ne pas encore avoir assez fait pardonner sa trahison pendant la guerre civile. Puis il se releva difficilement, le dos grevé par sa lourde armure et les genoux affaiblis par les années et la maladie.

« Hélas votre Grâce, dit-il avec de l'émotion de la voix, je crois avoir mal agit... Mon pauvre Pierre est mort... et son frère Roger l'a suivit dans la tombe peu après... L'oeil me poursuit depuis mon retour de cet infâme pays ! J'ai donné de mon corps et de mon âme, servit Dieu du mieux que j'ai pu pour occire les méchants, mais je ne suis point récompensé... Ma descendance se meurt... »

Ses yeux étaient mouillés par l'émotion, les larmes manquant de tomber sur ses joues marquées par les lésions que lui laissa la variole contractée dans le Ponant.

« Monseigneur, intervint Eustache, voudriez-vous entrer dans votre ville ? »

Eustache invita le duc à entrer dans la cité conquise.
Noyer-le-Grand était un bourg minable, que le maréchal avait rendu encore plus minable...
Eustache avait fait noyer la ville et désormais elle portait bien son nom. « Voilà Noyer-le-Grand noyée en grand ! » avait-il dit hilare à un Hubert de Vaudrincourt stoïque qui avait du mal à comprendre l'humour.
La terre des rues non pavées était encore gorgée d'eau, les portes des maisons étaient toutes défoncées, quelques toits brûlaient toujours. Il restait des cadavres, des hommes, des femmes et des enfants le corps ensanglanté et la tête plongée dans la boue. Les culottes rouges de l'armée ducale s'étaient visiblement bien amusées.
Pour constater les horreurs de la guerre, Eudes était suivi d'un cortège de hauts barons : le connétable Charles d'Annequin et son cousin Robert II de Lescure, le maréchal Eustache Tancarvelles et son cousin Robert Beaucoeur, le comte Hubert de Vaudrincourt, le baron Guillaume IX des Murets, et Raymond d'Espeyrac, fils du vicomte de Landéron.

« Beau travail sire Eustache » félicita Charles, mais ses paroles n'avaient rien de sincères, elles étaient plus adresser au duc pour lui montrer la bonne entente de façade entre les Annequin et les Tancarvelles.
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeJeu 23 Juin - 19:11
L’émotion de sieur Guillaume me fend le cœur, tout comme apprendre la mort de ses enfants. Quelle cruauté, rappelé d’une façon si brutale… Je pose ma main sur mon cœur, alors que je tords mes lèvres.

« Un père ne devrait pas avoir à enterrer ses enfants. Je suis sincèrement désolé pour votre perte, monseigneur…
Si je peux faire quoi que ce soit pour leur mère, dites-lui qu’elle peut me le demander. »


Guillaume a des choses à se faire pardonner — ce n’est pas à lui que je vais étendre ma mansuétude. Mais son épouse, Louise, est une toute autre affaire. J’espère qu’elle n’est pas trop éplorée.

Et nous entrons en ville. En rangs, moi vite gardé par mes fidèles Housecarles qui jouent des épaules pour pousser les chevaliers nobles — beaucoup trouvent ça insultant, mais c’est ainsi, les sigilaires ont trahi et ont été remplacés par plus loyaux qu’eux. Seuls se tiennent près de moi mes barons, et mon cousin Raymond, que je salue du chef.

À l’intérieur, c’est un carnage. Un qui me révulse. J’attends que Annequin félicite Tancarvelles pour lever la main, et arrêter tout le monde.

« Tiens, sire Eustache, une question ? »

Je pointe du doigt une femme qui est exsangue par terre.

« Qui pensez-vous qui a opposé la plus féroce résistance à nos vaillantes troupes ?
Elle, ou… »

Et je pointe du doigt un enfant tout blanc.

« Lui ? »

Et je regarde Eustache avec un air froid, impassible, sans lui montrer la moindre émotion.
Une bonne façon détournée et hypocrite que d’obtenir des justifications, sans immédiatement lui rentrer dedans.
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeJeu 23 Juin - 19:32
Eustache balbutia quelques mots, surprit par la question accusatrice du duc, avant de chercher du regard quelques soutiens parmi le noble cortège.

« Votre Grâce, intervint d'Annequin , vous connaissez bien les affres de la guerre. N'avez vous jamais vu de cadavre de femmes et d'enfant dans le Ponant ? »

Le connétable se tourna vers Guillaume des Murets, qui n'osa répondre. Lui en avait vu des cadavres de femmes et d'enfants, il en avait d'ailleurs passé plus d'un par le fil de son épée...

« Cette ville vous a fermé ses portes, vous a trahi, a soutenu un bâtard rebelle. Elle mérite la destruction avec ses habitants.
Puis-je vous rappeler que c'est un enfant qui vous a lancé une betterave lors de votre arrivée à Soulans ? L'innocence de la jeunesse n'existe pas. La graine de la rébellion pousse dès le premier age, mieux vaut arracher la mauvaise herbe à la première pousse. Nous allons pouvoir repeupler cette ville de bons et fidèles cahons, et nous pouvons remercier sire Eustache pour cela. 
»

Le connétable termina sa phrase par un geste de la tête envers Eustache, la solidarité chevaleresque prévalait toujours sur les vaines querelles.
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeJeu 23 Juin - 19:38
J’affronte le connétable du regard. Mais il ne faut surtout pas le confronter. Parce que le confronter, ça serait le mettre dans le même camp qu’Eustache.
Les Tancarvelles et les Annequins se détestent. S’ils s’unissaient, ils pourraient prendre la Cahogne.

« Je ne pense pas que c’est ce que sire Eustache en pense. »

Il est trop bête pour penser à une excuse.

« Ce que je pense, c’est que sire Eustache a compris que nous sommes ici pour défendre les gens du Vaujour, qui ont été martyrisés par des mercenaires — et que par zèle, ou folie, certaines pommes pourries de notre armée ont passé outre les valeurs de notre religion, et ont tué des innocents. »

Je regarde le cadavre de l’enfant avec dégoût.

« Trouvez-moi le ou les tueurs de cet enfant. Juste cet enfant.
Et qu’on le pende. »


Ce sera une bien misérable peine, comparé à tous ceux qui sont morts aujourd’hui.
Mais un peu de justice est mieux qu’aucune justice. Et ça devrait faire comprendre à mes hommes quel comportement j’attends d’eux.
Armarius
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeJeu 23 Juin - 20:54
« Il en sera fait selon vos ordres votre Grâce. »

Eustache fît quelques signes à la soldatesque qui le suivait. Ils allaient bien lui trouver un coupable, quel qu'il soit, afin de faire plaisir au duc et à sa soif de justice.
Puis il revint vers le duc.

« Monseigneur, j'ai prit l'initiative d'organiser un banquet pour votre arrivée. Je vous ai aussi fait préparer la chambre la plus grande de l'hôtel de ville. »

L'hôtel de ville, une tour médiocre, avait été épargné des exactions des soldats. Eustache avait fait les choses aux mieux pour plaire à son duc : la plus riche des cathèdres lui était réservée, la table était remplie de nourriture et des jongleurs et des musiciens avait été invités pour divertir la salle. On passa ainsi la soirée à boire, manger et discuter.
Pendant le banquet, quelques échevins de la ville et des chevaliers-bannerets du coin vinrent prêter hommage au duc de Cahogne, certains en profitant pour lui demander quelques intercessions dans des querelles les tracassant.
Puis on reçu Claude de Guizet, moine cramoisi et frère de feu Jean IV de Guizet, lâchement assassiné par des pirates stipendié par Tanguy de la Tour d'Arcy.
Le moine était accompagné de quelques soldats de la maison de Guizet dont deux portaient un coffre.

« Monseigneur le duc de Cahogne, je viens à vous comme représentant de mon neveu le baron Jean de Guizet et de sa mère Hélène.
Monsieur le baron étant bien trop jeune pour se joindre à votre ost, je vous apporte son écuage,
dit-il en montrant derrière lui le coffre. Voici 5 000 livres afin que vous puissiez vous offrir les services de soldats. J'en profite pour vous transmettre les salutations de mon neveu et de sa mère. Nous sommes heureux de vous revoir en Cahogne, le pays a besoin de vous. »

Claude termina sa phrase par une humble révérence envers Eudes.

* * *

Plus tard dans la nuit, Eudes se retira dans la chambre qu'Eustache lui avait fait préparer. Elle n'avait rien de celle du palais de Soulans, ni même de la tente ducale qui l'accueillait en campagne, mais elle ferait l'affaire pour la nuit. Cela faisait presque une décade que le duc n'avait pas dormi sous un vrai toit.
Alors qu'il avait été laissé seul pour se coucher, les fidèles housecarles protégeant la porte, Eudes entendit quelqu'un entrer discrètement.
Il vit alors devant lui un homme encapuchonné sous une cape de voyage d'où dépassait des manches une cotte de maille.
Comment avait-il pu déjouer la vigilance des gardes ?

« Mon prince, il faut qu'on parle. »

Lorsque l'homme retira sa capuche, Eudes reconnu son chancelier Espien de Raysac.
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeSam 2 Juil - 23:04
Mon beau-frère a fait du mieux possible. Claujacques est à nous, et on le ressent vite ; hommages, poignées de mains, tout le toutim. La ville nous obéit comme elle ne savait pas le faire à l’époque où elle était soumise à des mercenaires ; je profite de mon arrivée pour faire demander à mes nouveaux sujets d’écrire tous leurs griefs et tous les torts que Malestoit leur a fait subir. En temps et en heure, je rembourserai en numéraire ce qu’on leur a pris.

L’arrivée de Claude de Guizet m’honore. Voilà un vassal qui se rappelle de ce qu’est l’écuage.

« Transmettez mes remerciements en retour. Et sachez bien que si votre neveu est du bon âge, il peut venir à ma cour afin de servir de page — je m’occuperai de lui fournir la meilleure éducation possible, comme cela sied à son rang.
Vous êtes un homme de lettres, mon frère ? J’aimerais beaucoup parler avec vous ce soir au dîner. »


J’ai aussi à parler avec beaucoup d’autres gens. Y comprit ce pauvre Raymond. J’espère que les choses vont mieux depuis le sacre…



Alors que j’étais tranquillement en train de somnoler, quelqu’un entre par effraction dans ma propre pièce, déjouant la sûreté de mes gardes. J’hésite un instant à hurler à l’aide afin que les Housecarles entrent, tandis que je me dresse tout droit. Mais voilà qu’arrive l’évêque, ce satané Espien de Raysac.
Si mes relations avec lui étaient tendues avant mon départ, elles sont tout simplement devenues exécrables depuis sa lettre menaçante. Je me lève tout droit, profitant de ma taille supérieure à la sienne, tandis que je le désigne du doigt.

« Quelles sont ces manières, évêque ?! Comment osez-vous vous montrer ainsi ?! »

Je me demande s’il est armé, ou s’il a des sbires proches. En tout cas, la colère prend le pas sur la peur.
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeMar 5 Juil - 14:30
Espien resta silencieux devant la colère du duc, puis retira son long manteau de voyage pour le poser sur le dossier d'une chaise. Il était habillé d'un vêtement simple qui ne trahissait ni sa fonction ni sa fortune. Il était là dans l'anonymat.

« Voyez mon prince, je ne porte mes attributs d'évêque, je ne suis pas là comme prélat ni comme chancelier, je suis là en tant qu'homme et surtout en tant qu'ami.
Moi sans ma mitre, vous sans votre couronne, j'aimerais que l'on se parle sincèrement, loin des protocoles de la cour, car le duché se trouve face à un grand péril je le crains.
Voyez-vous mon prince, je m'inquiète pour votre âme et l'avenir du pays, et nos derniers échanges par courrier n'ont fait qu'accroître cette inquiétude. Depuis le premier jour de votre retour vous ne m'accordez ni crédit ni confiance. Je constate que vous ne suivez aucun de mes conseils : je vous ai dit de vous méfiez des ambitions de votre cousin Raymond, mais qui vois-je toujours à vos côtés ? Je vous ai dit de laisser Toussaint dans sa geôle, mais qui avez-vous fait libérer ? Je vous ai dit de répudier votre amante, mais qui se trouve toujours à la cour ? Et lorsqu'il fallait nommer un régent pendant votre campagne, vous m'avez écarté sans considération.
Si j'ai fait tout ce chemin depuis Soulans en mettant ma personne en danger pour entrer dans cette zone de guerre, c'est pour vous dire que vous faite erreur mon prince.
 »

Espien s'approcha encore, regardant Eudes droit dans les yeux.

« Mon prince, le duché court en grave danger, par votre entêtement et votre irresponsabilité ! C'est l'excommunication qui vous guette !
Ne vous croyez pas à l'abri, c'est déjà arrivé dans votre famille avec votre aïeul Raoul Beauclerc, et c'est pour cela que sa tombe ne se trouve pas avec les siens au Sanctuaire. C'est ce que vous désirez vous aussi ? Reposer pour l'éternel loin des vôtres ? Et votre famille a tant fait pour effacer cette souillure. C'est pour supprimer la trace laissé par Raoul que son fils Hugues a été canonisé. Si vous ne répudiez pas Arda et que l'Archevêque vous excommunie, ce n'est pas seulement sur vous que vous allez jeter l'opprobre, mais sur tous vos descendants qui devront subir les conséquences de vos actes pour les siècles à venir !
Pire encore, vous allez mettre en péril toute notre diplomatie construite depuis des années. Que ferait un prince excommunié mit au ban de l'Eglise ? Vous pourrez dire adieu à la succession de la baronnie d'Aigues, car la pieuse baronne ne voudra jamais de vous pour héritier. Le roi d'Estovie ne voudrait certainement plus échanger avec vous car la seule chose qui vous assure son alliance pour le moment c'est la religion que vous partagez. Et qui voudra épouser un excommunié ? Vous laisserez alors le champs libre à Thomas d'Estaing qui deviendra l'homme fort de Cahogne.
Et n'avez-vous pas peur de raviver les braises de la révolte ? Notre pays sort tout juste d'une affreuse guerre civile et vos ennemis n'attendent que ça pour vous spolier de votre trône. Vous avez beau être un prince sacré, vous êtes aussi un homme, un homme mortel. Les barons pourraient très bien décider de vous remplacer. Craignant de ne pas vous voir revenir de croisade la question s'était déjà posée. Les candidats ne manquent pas : votre frère Lothaire, vos cousins Raymond ou Hubert, voir l'une de vos sœurs ? Même les fils d'Annequin, dont la mère était votre tante, ne manquent pas de revendication sur vos titres. Ou encore pourquoi pas Thomas d'Estaing, qui a épousé votre cousine non seulement pour le Porez mais aussi pour la légitimité qu'elle lui donne à prétendre au trône de Cahogne ?
 »

Soit Espien jouait bien la comédie, soit il était sincèrement inquiet. Pour la première fois depuis leur première rencontre, Eudes pouvait entendre de la crainte dans la voix de l'évêque. Lui qui jusque là semblait maîtriser les éléments, paraissait cette fois prit au doute.

« A l'heure où des hérétiques sont à nos portes, où les païens veulent prendre nos territoires, où nos ennemis veulent nous détruire, la Cahogne a besoin d'un duc irréprochable.
Je vous ai promit de vous aider et c'est ce pourquoi je suis là. Nous pourrions être un seul monarque à deux corps. Le duché aurait bien besoin de deux hommes pour être dirigé, tant les périls nous guettent. Vous ne pourrez pas régner seul. Votre père le comprenait et c'est pour cela qu'il m'accordait sa confiance.
Mais si vous continuez ainsi dans votre entêtement, alors  je serais contraint de vous remettre ma démission. Et si vous vous réjouissez d'une telle occasion pour m'écarter du pouvoir, détrompez vous car c'est là un grand danger pour vous et le duché. Personne actuellement n'est à même de me remplacer...
 »
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeMar 5 Juil - 15:24
Espien chiale. Toujours les mêmes histoires, toujours les mêmes peurs. Pourtant, ma colère se dissipe, car ses propos sont bien construits, et surtout, ont la semblance de la sincérité.

Mais si je ne peux pas accepter ce qu’il dit, nous pouvons au moins en discuter.

« Je ne suis pas Raoul Beauclerc. C’était il y a un siècle et demi, les choses sont terriblement différentes aujourd’hui.
Croyez-vous vraiment qu’il soit dans l’intérêt de la Sainte-Église de m’excommunier ? Moi ? Un Prince qui a sauvé le Ponant, tout juste rentré de Croisade ? Même si mes ennemis s’en réjouiraient et en profiteraient pour se jeter sur moi, eux-mêmes n’apprécieraient pas le signal que ça envoie — le roi d’Estovie récemment converti verrait un prince d’Empire ainsi traité comme un simple fidèle, que penserait-il de cette religion ? Je couche avec une fille hors des liens du mariage, combien de personnes dans tout l’Empire le font ? Bon sang, monseigneur, je ne suis même pas marié, on ne peut même pas m’accuser d’être adultère !
Et il y a les schismatiques, les hérétiques. M’excommunier, c’est me lancer dans leurs bras. Non, non, c’est l’archevêque qui a énormément à perdre, alors que je ne lui ai témoigné que de la bonne volonté depuis que je l’ai rencontré. Mais c’est le souci avec tous ces gens qui me parlent depuis mon retour de croisade — vous souhaitez tous me menacer et me manipuler, vous n’avez que ces mots à la bouche. »


Je me déplace dans la pièce. Je tire une chaise, et la pose devant moi. Ensuite j’en prends une autre, et m’assois. J’invite l’évêque à me rejoindre.

« Nos humeurs et nos fonctions ne sont pas similaires, c’est pour cela que nous avons du mal à nous comprendre. Mais je veux que vous compreniez bien une chose ; le monde a changé. Tous les chanceliers qui vous ont précédé, et tous les ducs avant moi, ils ont construit quelque chose, et c’est à nous de l’entretenir, c’est notre devoir.
L’heure n’est plus aux barons et au gouvernement de quelques. Ils ont encore beaucoup de pouvoir, les aristocrates, mais s’ils s’agitent si fort, c’est parce qu’ils savent que le glas sonne pour eux. De nos jours, nous régnons par l’impôt, par les armées levées par endenture, par le parlement et les chartes.
Et quelle est la place d’un duc, dans un tel monde ?
Je ne serai jamais irréprochable, monseigneur. Même si je faisais tout ce que vous me disiez, d’autres problèmes seraient advenus. Ne pas me rapprocher de mon cousin Raymond, c’est risquer que sa famille s’éloigne de moi comme ma cousine Clotilde. Toussaint hors de sa geôle, c’est aussi une arme contre ceux qui veulent prendre ma couronne — lui aussi a des revendications à jouer. Quant à Arda, je crois que vous sous-estimez l’amour que tous les petits chevaliers de Cahogne ont pour les jolies histoires de romance ; elle est populaire auprès des servantes, les rumeurs autour de moi peuvent être converties en bonnes paroles, je peux passer pour quelqu’un de sympathique et d’amoureux ; c’est une réputation très utile auprès du peuple et de la petite noblesse.
Car c’est ça, le rôle d’un duc. Mon pouvoir, c’est que des symboles, et la personne que je suis n’est pas importante. Tout ce qu’il faut, c’est que j’incarne des fonctions que d’autres personnes remplissent. Je suis un corps, rien de plus. »


Petite pause, et petit sourire à l’évêque.

« Je vous admire, monseigneur. Mais je crains que l’habitude et les menaces de nos ennemis vous aient fait perdre de la hauteur de vue. Mais je ne dis pas cela en croyant que je suis plus malin que vous — moi, mon défaut, c’est de revenir soudainement en Cahogne, de tout renverser, alors que j’ai d’énormes lacunes dues à mon absence. Je suis craintif, je vois la situation terrible de notre duché, à cause des dernières années du gouvernement de mon père, et il est logique pour moi de soupçonner les personnes de ma cour d’y être pour quelque chose, vous devez bien le comprendre, non ?

Vous n’êtes pas un aristocrate, monseigneur. Vous vous êtes réalisé tout seul. Je pense que vous et moi, nous pourrions nous entendre. Véritablement travailler ensemble. J’aime votre intelligence, votre charisme, votre érudition. Mais je ne serai jamais votre créature, Espien, tout comme à l’inverse, je ne vous demanderai jamais d’être la mienne. Tout ce qu’il faut, c’est que nous partagions la même vision de ce que nous voudrions, en Cahogne.

Je rêve d’une Cahogne prospère et commerçante, où le commun est heureux, où on respecte son prochain peu importe sa culture, où la chevalerie dressée sert vraiment son prince, et où les querelles de clochers demeurent de simples débats théologiques, sans amener le bûcher et l’autodafé. Je rêve de ne plus avoir de pouvoirs, et d’être simplement admiré car je représente une Cahogne capable de prendre elle-même son destin en main. Et pour cela, je dois me débarrasser de l’omniprésence des barons, des petits arrangements de coutumes, et surtout, je ne dois pas craindre l’excommunication, simplement parce que je suis amoureux d’une jeune femme.
Ce n’est pas un petit rêve. Je ne le verrai probablement jamais. Mais j’ai le devoir de permettre à mon successeur de le poursuivre. Et j’aimerais avoir à mes côtés un homme qui partage ma vision, et qui souhaite la même chose que moi.

Vous pourriez être cet homme. Vous pourriez même être archevêque de Cahogne. Nous avons eu un mauvais départ, peut-être ai-je commis des erreurs, peut-être devrais-je plus vous écouter. Mais je veux que vous compreniez qu’aucune de mes actions n’était un petit caprice personnel.
Est-ce que vous pouvez l’entendre ? Est-ce que vous pouvez comprendre ma vision des choses ? »
Armarius
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeMar 5 Juil - 16:18
Espien rejoignit le duc sur une chaise et l'écouta attentivement
Loin de la cour, des trônes, des couronnes et des mitres, ils parlaient d'égal à égal, dans l'intimité d'une chambre à coucher. Paradoxalement, c'est dans ce genre d'endroit que ce faisait le plus souvent la vraie politique.

« Nous partageons les mêmes objectifs, je souhaites que ce pays et son peuple aillent pour le mieux.
Je ne vous demande pas d'être ma créature, vous êtes le duc de Cahogne et moi je ne suis que votre humble conseiller. Mais si vous ne suivez pas mes conseils alors je ne suis pour vous d'aucune utilité...
Bien évidemment que l'Eglise de Cahogne aurait beaucoup à perdre avec un duc excommunié, mais que pourrait-elle faire d'autre ? Le problème n'est pas que vous copuliez hors mariage, mais que vous partagiez votre lit avec une infidèle récupérée en outremer ! Vous êtes un prince croisé sauveur du Ponant, ne laissez pas cette belle réputation être piétinée par la sujétion à vos passions. Si votre amour pour une infidèle est révélé au grand jour, ce serait un déshonneur pour vous, la Cahogne, son peuple et son Eglise.
Et l'excommunication ne relève pas que de l'archevêque seul mais aussi du concile de Cahogne. L'influence du comte de Trémanche et de ses alliés y est grande, vos ennemis pourraient en profiter pour vous piéger. Arda pourrait devenir le casus belli qui permettra à la révolte de renaître, la fissure par où le serpent s'immiscera et empoissonnera votre règne !
Je vous en conjure mon prince, il faudra la répudier. Avouez tout avant que le légat ne le découvre, faite amende honorable auprès de l'Eglise, ou vous pourriez tout perdre.
Vous savez combien l'Eglise accorde d'importance aux mœurs, que vous soyez duc n'y change rien.
Votre titre vous oblige aux sacrifices. Arda représente un danger pour vous, votre âme, votre réputation et votre honneur, et donc à travers vous un danger pour toute la Cahogne. Il vous faut vous débarrasser de cette faille où vous ennemis en profiteront. Car certains préfèrent voir le pays à feu et à sang pourvu qu'ils puissent régner dessus. Peu leur importe que la Cahogne soit un tas de cendre s'ils sont assis sur son trône !
 »
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeMar 5 Juil - 16:53
Je grince des dents.

« Elle s’est convertie, elle n’est pas infidèle. Vous savez que ça ne tient pas. Si nous avons des missionnaires, c’est bien parce qu’on peut passer de païen à fidèle. Je suis sûr que nombre de chevaliers pourraient bien être convaincus de partir à la Croisade, s’ils pouvaient ramener une épouse étrangère et exotique qui ferait de bons enfants Triaphysites.
Mais là où vous avez raison, c’est que actuellement, cachée comme un secret, avec son nom qui sonne trop étranger, elle passe mal. Elle a des allures de sorcière, de tentatrice. Ça présente pas bien. »


Je croise une jambe sur l’autre.

« Et si elle se rebaptisait, ici, en Cahogne ? Si elle prenait un prénom Triaphysite ? Elle pourrait même se faire nonne.
Ne sous-estimez pas Arda, monseigneur. Si elle est à mes côtés, ce n’est pas simplement parce que je suis bouffi de passions. Elle est très maline, elle a appris à parler notre langue si rapidement. Je suis sûr qu’elle-même serait capable de convaincre le légat qu’elle est devenue une bonne croyante.
L’avez-vous déjà rencontrée, au moins ? Si vous voulez être mon ami, vous pourriez savoir pourquoi je tiens tant à elle. »

Je marque une pause.
Je joue au malin. Mais en réalité, je devrais être plus humble.
Je soupire, alors que je deviens soudain plus las.

« Je vais le dire plus concrètement : C’est une faveur que je vous demande. Je vous demande, si vous le voulez bien, de m’aider à protéger mon amante. Et évidemment, ce n’est pas une petite chose. Je sais pour quoi je vous serai redevable, si vous acceptez de m’aider. Si vous faites cela en tant qu’ami, je serai forcé de faire de même pour vous, par la suite. »
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeMar 5 Juil - 19:16
« Je vous crois mon prince lorsque vous me dite qu'elle est convertie. Et si vous l'aimez je suis convaincu de ses qualités. Mais vos ennemis risquent d'être moins enclins à vous croire et ils pourraient se servir d'elle pour vous atteindre. Avouez que le grand héros de la croisade qui s'entiche d'une infidèle serait mal vu non ? On pourrait même commencer à douter de vos exploits en terre sainte... »

Espien observa dans un coin de la pièce l'armure ducale immaculée de toutes traces de combat, sans bosse ni sang, la lys intacte.
Il resta un moment hésitant.

« Très bien mon prince, je vous aiderai à protéger votre amante. Mais seulement pour protéger la couronne et parce que je suis votre ami. Mais vous ne pourrez la garder auprès de vous, c'est trop dangereux pour votre réputation, surtout que nous devons vous marier.
Qu'elle reçoive la première onction, qu'elle prenne un nom triaphysite, et qu'elle intègre un couvent si vous voulez. Je veillerais personnellement à ce qu'elle ait tout ce qui lui faut.
 »
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeMer 6 Juil - 11:48
Je soupire longuement. Je savais que ça ne pourrait pas durer éternellement avec Arda. Mais au moins, je ne la répudierai pas comme une puterelle.

« Très bien, monseigneur. Nous reconnaîtrons notre relation, mais aussi que nous y mettons fin — Arda deviendra une triaphysite, et surtout, une sœur Sabine.
C’est bien. Ça protégera pas seulement la Couronne — ça la protégera elle. »

De tous les couvents, celui des Sabines est probablement le seul où elle s’épanouirait. Elle est intelligente et cultivée. Elle pourrait adorer cette nouvelle vie.
Le seul problème, c’est que ça lui arracherait son enfant des mains. Inutile de le cacher à mon ami, il sera au courant bien assez tôt.

« Ce n’est pas juste ma putain, monseigneur. Si je vous mets dans un tel embarras, c’est parce que je lui ai fais un enfant.
Que dirait le Paraclet d’un homme qui abandonne sa progéniture ? »

Je regarde Espien avec des yeux torves. Je cherche plus à le manipuler — je parle comme un fidèle parle à son confesseur.

« Ne vous inquiétez pas, je ne vous ferai pas l’ignominie de créer une « situation » Tancarvelles. Cet enfant métis, je ne le légitimerai jamais. Il grandira à la cour, mais il sera élevé dans ma chapelle, et quand il sera adulte, il entrera dans les ordres de son choix. Il aura une vie heureuse, mais il n’approchera jamais du trône. »

Au moins là-dessus, je suis clair.

« Merci monseigneur, pour être venu. Je préfère vous parler d’homme-à-homme — vous m’êtes plus sympathique ainsi. Par lettres, je vous sentais plus menaçant. Mais si vous avez l’intérêt de la Cahogne en tête, alors je suis obligé de me rendre à votre opinion.
Comment vont les choses à Soulans ? Y a-t-il d’autres affaires à traiter ? »
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeMer 6 Juil - 13:26
« Hum... je me doutais bien que cet enfant était le votre...
Ce serait fâcheux si le légat venait à apprendre votre lien, car un cahon né en outremer on appelle ça un poulain, un cahon né d'une ponantaise on appelle ça un gasmule, mais un cahon né d'une Sanlar ? Comment appelle t-on ça ? Nous n'avons pas de mot pour ça car cela ne devrait pas exister...
 »

Espien resta pensif un moment, puis adressa un sourire à son duc.

« Je suis rassuré que vous entendiez raison. Croyez moi, c'est la meilleur solution, pour vous et le duché, mais aussi pour Arda et son enfant. Je sais bien que cela vous coûte mon prince, il est toujours difficile de renoncer à l'amour, moi-même j'ai dû faire des sacrifices pour entrer dans les ordres... »

Pendant une fraction de seconde, Eudes vit Espien replonger dans les souvenirs de l'homme qu'il avait été avant de recevoir l'anneau pastoral. Le chancelier était ce genre de personnage à avoir vécu plusieurs vies en une seule.

« Sachez qu'Arda ne manquera de rien, j'y veillerai personnellement. Son fils recevra la meilleur éducation et pourra même intégrer mon chapitre lorsqu'il en aura l'âge. Mais afin d'éviter d'éveiller des ambitions chez lui, il faudrait qu'il ne connaisse pas l'identité de son père...
Je vais parler au légat et tout lui avouer en tournant cela à notre avantage, je lui dirais que non seulement vous avez sauvé le Ponant, mais aussi l'âme de cette jeune femme en lui apportant la vraie religion à elle et à son fils. Valbert est connu pour son action envers les prostituées repenties, je suis sûr qu'il serait touché par une telle histoire.
 »

Espien se leva, beaucoup plus détendu que lorsqu'il était entré clandestinement.

« Rien de neuf à Soulans. J'ai envoyé une missive à l'Archevêque pour présenter au concile la candidature de frère Valéry à l'évêché de Vassy. Les choses sont en bonne voie pour son élection, les chanoines de Vendaume ont apprécié vos libéralités. Mais pour le moment aucun autre candidat ne s'est déclaré, je suppose que le comte de Trémanche devrait proposer le sien dans les prochains jours.
J'ai aussi eu vent de vos projet de mariage entre Eustache et votre sœur. J'espère que dans le conflit qui oppose les Fitzonfroi et les Fitzmauger vous n'avez pas prit un camp, car vous savez que les Annequin sont alliés à Richard Beaucoeur, n'oubliez pas de ménager cette puissante famille...
 »
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeLun 11 Juil - 16:44
Ce que me demande Espien est dur, mais je me doutais qu’il faudrait un jour ou l’autre que je m’y confronte. Arda en Sabine, elle serait heureuse. Mais Albert ? C’est cruel, de mentir sur ses origines. Il pourrait ne jamais me le pardonner, tout comme sa mère n’accepterait pas d’être séparée de lui.

« Je n’ai pas seulement sauvé son âme, j’ai sauvé sa vie. Vous savez comment je l’aie rencontrée, monseigneur ? En la tirant d’un massacre commis par notre armée.
Les chevaliers savent bien faire ça, terroriser la population, tuer des innocents. Ils l’ont fait encore aujourd’hui, à Claujacques. Pourquoi Dieu ne nous foudroie-t-il pas tous est un mystère pour moi. »


Je suis pas une mauviette. À la guerre y a des blessés ou des morts. Je ne pleure pas pour quelques mercenaires tués, de quelque façon que ce soit. Mais des innocents ? Des gens qui veulent juste prier et travailler ? Eux ils méritent pas leur sort.

Heureusement le sujet change. On rediscute de politique.

« Le comte de Trémanche sera constamment une épine dans mon pied. Quand je pense que j’ai tout fait pour montrer ma bonne volonté à ma cousine Clotilde ! Elle n’a aucun respect pour moi et multiplie les insultes car elle sait que la Cahogne est dans une période mouvementée, et que son époux puissant va la défendre.
Gagner Vassy serait un bon moyen d’inverser la tendance. N’hésitez pas à me dire si je dois faire quelque chose pour faciliter l’élection de notre candidat. Des libéralités, évidemment, mais y a-t-il autre chose que les chanoines demanderaient ?


Il faudra bien régler la succession des Tancarvelles à un moment, le conflit larvé a assez empoisonné les relations à la cour. Pour l’heure, j’essaye de jouer sur les deux tableaux, mais il est vrai que c’est surtout le fils de Mauger qui a profité de mes faveurs, même si Beaucoeur est devenu maréchal. J’aimerais bien reconnaître la succession en faveur d’Eustache, mais seulement si en échange, Beaucoeur se taille un bel apanage qui lui permettrait d’être indépendant.
Mauger et Charles d’Annequin deviennent vieux, moi je suis jeune. Si je peux m’attacher leurs enfants comme amis, sur le long terme, c’est moi qui gagne. J’ai peut-être une idée pour ça — j’aimerais fonder un ordre de chevalerie, un ordre laïc, pour honorer les fils des barons de Cahogne et de l’Empire. Ça pourrait être une institution prestigieuse, qui attirerait les yeux de la noblesse. Les Porte-Croix font rêver les garçons, mais leurs vœux de chasteté et de pauvreté sont assez repoussants pour nombre d’héritiers. Qu’en pensez-vous ? »
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeLun 11 Juil - 17:10
« Pour les chanoines je pense que vous en avez fait assez. Ce qu'il faudrait c'est convaincre les autres barons ayant de l'influence sur les chanoines du concile de soutenir notre candidat. Je pense qu'il n'y aura pas de soucis pour que vos proches nous suivent, les Saint-Saëns, les Tancarvelles ou les Annequin, pour les autres ce n'est pas sûr.
Mais je pense surtout à la baronne d'Aigues, dont l'influence est grande dans le clergé, et qui a toujours agit indépendamment. Mais si nous voulons gagner l'élection il faudrait surtout convaincre l'archevêque. Avec son soutien nous serions assurés de remporter la bataille.
Attendons déjà de savoir quel candidat va s'opposer au notre.
 »

« Vous avez raison de vouloir vous attacher leurs enfants, mais vous savez comme les querelles sont tenace chez la noblesse, un même conflit peu perdurer sur plusieurs générations, si bien que les petits enfants en oublient parfois les raisons de leur dispute, et l'animosité entre deux familles en devient juste naturelle. Vous avez raison de vouloir mettre un terme à ces problèmes, mais leur résolution ne devra se faire que si le duché en sort gagnant.
Un ordre laïc pourrait être une bonne idée oui, mais seulement si cette institution est consacré par le clergé. Elle pourrait ainsi remplacer la garde sigilaire que votre père a dissoute. La noblesse était très attachée à cet ordre pour honorer leurs cadets et beaucoup aimerait la voir restaurer.
 »
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeJeu 21 Juil - 23:45
« Vous avez raison. Il n’y a pas moyen de se renseigner sur quels candidats d’Estaing serait tenté de mettre en avant ? Autant préparer notre stratégie en amont. »

Sur mon projet d’ordre chevaleresque, le chancelier ne peut pas s’empêcher de ramener le curé dans mes affaires. Évidemment, je parle à un clerc.

« La garde sigilaire ne sera jamais restaurée. Cette garde était bien trop puissante, et trop traître, alors qu’elle devait garder le corps du duc.
Mais un ordre de chevalerie permettrait d’honorer les fils des barons, de les rendre éclatants, sans pour autant leur donner trop d’importance politique… Je comptais commencer à élaborer ses statuts dès mon retour à la capitale. Si ça vous intéresse, vous pouvez y participer, je ne sais pas si vous y voyez un quelconque intérêt… »

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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeVen 22 Juil - 1:14
« Soyons patient mon prince, je pense que la Trémanche ne tardera pas à annoncer son candidat. Nous pourrons alors agir plus aisément. 
Je suis d'accord avec vous concernant la garde, ces nobles tous imbus d'eux même ne sont pas les plus à même de vous protéger. Mais beaucoup ne sont pas de cet avis, la garde Sigilaire était une institution héritée du premier duc de Cahogne, sa dissolution a laissé un grand vide. L'Eglise soutiendra la création d'un ordre de chevalerie. Il serait bon que cet ordre soit dédié à la croisade, et rien de mieux que vous pour le diriger.
 »

Le chancelier récupéra son manteau de voyage pour l'enfiler à nouveau, sans oublier de remettre sa capuche pour rester anonyme.

« Permettez moi de dormir ici pour la nuit. Je repartirais demain pour Soulans dès la première heure du matin, j'ai à discuter avec un certain légat. Je n'oublierai pas de faire donner une messe pour vous et vos soldats. Je vous souhaite une bonne nuit mon prince. Et que celui qui est Trois soit avec vous. »

* * *


L'état major de Cahogne s'était réuni au petit matin dans l'une des grandes salles de l'hôtel de ville de Noyer-le-Grand. Autour d'une table présidée par le connétable Charles d'Annequin, où une carte stratégique de la région du Vaujour avait été dépliée, se trouvaient le duc de Cahogne et ses cousins Raymond d'Espeyrac et Hubert de Vaudrincourt, le maréchal Eustache Brascourt et son cousin le maître de la cavalerie Richard Beaucoeur, le baron et sénéchal des Landes Guillaume IX des Murets ainsi que le Grand Ecuyer Robert II de Lescure.
Le connétable faisait l'inventaire des troupes réunies à Noyer-le-Grand.

« Encore trop peu de vos vassaux ont répondu à l'appel à la guerre monseigneur.
En plus des 15 000 soldats ducaux, j'ai moi même rejoint l'ost avec 1 700 soldats, le sire de Saint-Saëns en a livré 870 et depuis hier, sire Guillaume nous a rejoint avec 1 800 unités.
- Mon père arrive dans les prochains jours avec nos hommes,
intervint Eustache, il a réuni 3 000 de nos soldats.
- Je suis moi même venu avec 200 soldats,
intervint à son tour Raymond, c'est ma garde personnelle, le Landéron ne peut envoyer plus de soldat à moins d'entrer en guerre officiellement, mais mon père craint la réaction du duc de Basse-Julienne allié à Landebroc. »

Annequin fit un signe de tête compréhensif envers Raymond.

« Le jeune baron de Guizet nous a remit son écuage mais les autres font toujours la sourde oreille.
- C'est toujours ainsi lorsque la couronne change de tête,
se permit de dire Robert de Lescure, les barons cherchent à tester la valeur du nouveau duc, il faut leur rappeler leur devoir envers leur suzerain.
- C'est honteux,
commenta Guillaume des Murets, le service militaire fait parti des engagements dû à notre seigneur, quel qu'il soit. Ces couards ne sont que des félons !
- N'en arrivons pas déjà là sire Guillaume,
tempéra Charles d'Annequin, il faudrait leur rappeler leur devoir. Le sire de la Tour d'Arcy est en prison et ses biens sous séquestre, le baron de Montfay est absent et ceux de Jurenne et de Bléa-Germain sont encore mineurs, mais quand est-il des sires de Cinqfoy, de l'Estienne, de Gillefontaine et de la Roche-Bouillon ? Et ne parlons pas de la comtesse de Porez... »

On frappa à la porte de la salle, coupant les discussions. Après un signe de tête du connétable, un valet ouvrit. Un messager attendait qu'on lui ouvre.

« J'ai ici une lettre à l'attention de sa grâce le duc de Cahogne. »

Charles d'Annequin récupéra la lettre, donna une pièce au messager puis remit le papier à son suzerain qui l'ouvrit sur le champ.

Rattier de Pene-Penac a écrit:
« Monseigneur le duc, le stratagème pour tromper Malestoit a parfaitement fonctionné. Voyant l'étendard du Valais il m'ouvrit ses portes et me laissa entrer. Là, j'ai trouvé votre capitaine renégat blessé et alité. Il se trouve que Malestoit a été touché par une flèche sur le flanc droit lors de votre assaut. Ses jours ne semblent pas en danger mais il est pour le moment hors de combat. J'ai passé la soirée avec lui, et l'ai rassurer sur son avenir, lui promettant mont et merveille de la part du comte du Valais. Dans la nuit, le piège s'est refermé. Nous avons massacré ses hommes dans leur sommeil et j'ai capturé Malestoit.
Dans l'attente de vos ordres. »
- Sire Rattier de Pene-Penac, châtelain de Claujacques.
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeDim 24 Juil - 17:38
Les effectifs sont suffisants, mais ils pourraient être meilleurs. C’est toujours comme ça, quand le duc part en guerre ; il y a les barons censés servir qui traînent. Ce n’est pourtant pas bien compliqué — l’écuage ou le service, et j’ai tendance à préférer l’écuage : avec de l’argent, on paye des chevaliers volontaires, qui sont sûrs de se battre et de servir. C’est le futur, rémunérer ses militaires, sans avoir recours à la féodalité. Voilà de quoi bien me donner mal à la tête.

« Ne t’inquiète pas, Raymond »
, je rassure mon cousin. « Que tu sois là est déjà une grande aide, il n’est ni dans mon intérêt, ni dans celui de Landebroc de transformer ce conflit local en guerre qui embraserait la région.
Ce sont mes barons les fautifs. Qu’on exige d’eux l’écuage, en menaçant de le grossir d’amende pour chaque jour de retard. Demander du numéraire sera plus simple que d’exiger des hommes armés. »


Alors que je m’apprêtais à avoir l’opinion de mon conseil, un messager arrive. Je lis la missive silencieusement dans ma tête, une fois que le connétable me l’a tendue. Je lève un sourcil.

« Tiens donc. »

Pas besoin de hurler victoire ou de se réjouir.

« Sire Rattier prétend qu’il a pris Claujacques — et Malestoit — pour nous. Voilà une perspective intéressante. »

Je souffle un peu. Ce sale rouquin s’est bien rendu indispensable. C’est lui, le futur sénéchal du Vaujour. Il s’est mis dans la bonne position, et a trahi son maître au bon moment. Tant mieux pour lui.

« Qu’on envoie des hommes à Claujacques pour former une garnison, et qu’on me ramène Malestoit ici. Je vais enfin pouvoir lui parler. Et vite — je commence à en avoir marre de nourrir les prisonniers de sa bande. »
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeLun 25 Juil - 14:36
A l'annonce du duc de Cahogne, les membres de l'état major affichaient des mines réjouies. Si Pene-Penac ne mentait pas, c'était là enfin une grande victoire pour le duc de Cahogne.
Avec Malestoit emprisonné, le Vaujour était enfin en sécurité, contrôlé par les troupes ducales et ses habitants allaient pouvoir être vengés de toutes les malversations qu'ils avaient subit.
Annequin fit appliquer les ordres du duc, on mobilisa plusieurs messagers pour les dépêcher aux quatre coins du duché afin de rappeler aux barons récalcitrants leurs devoirs, puis on rassembla une petites armées pour les envoyer vers Claujacques.
En sortant du conseil de guerre Charles d'Annequin s'approcha du duc :

« Monseigneur, j'aurais une faveur à vous demander. Voyez-vous, mon puîné, Pierre, vient d'atteindre ses 15 ans. Il a servit fidèlement son oncle comme page pendant sept ans et il est en âge de devenir écuyer. J'aurais voulu que vous le preniez à votre service. Pierre a un grand potentiel, et je pense monseigneur que vous seriez le plus à même de le déployer. Vous avez tant apprit au Ponant, mon fils ne pourrait avoir de meilleur professeur pour apprendre les arts de la guerre.
Lorsqu'il sera en âge d'être chevalier je suis sûr qu'il embarquera sur le premier navire afin de suivre votre exemple et de combattre les infidèles en terre sainte.
 »

* * *


Eudes attendit impatient toute l'après midi que Rattier de Pene-Penac ramène sa belle prise à Noyer-le-Grand.
Vers les 17h, un messager annonça son arrivée, puis quelques minutes plus tard les bannières de la maison de Pene-Penac pointèrent à l'horizon.
Le Haut-Sénéchal du Valais marchait fièrement en tête de son escorte sur un beau et puissant destrier. Il tenait dans une main une corde, et au bout de cette corde le cou serré du capitaine mercenaire Malestoit.
Le voilà enfin, celui qui avait causé tant de torts aux gens du Vaujour et au duché de Cahogne. Il semblait grandement diminué, pâle comme un linge, le flanc recouvert d'un bandage ensanglanté.
Ses mains étaient attachées, son armure lui avait été retirée pour ne lui laisser que des guenilles, et il peinait à mettre un pied devant l'autre. Ce n'était pas ainsi qu'on traitait un chevalier, ce que prétendait être Malestoit.
On avait préparé une cathèdre à l'extérieur sur un tapis rouge afin que le duc de Cahogne reçoive son vassal et son prisonnier. Pene-Penac approcha :

« Votre grâce ! Voici le félon qui vous a tant fait de mal à vous et à votre pays. Puissiez-vous rendre la justice comme se le doit le duc de Cahogne ! »

Pene-Penac tira sur la corde, faisant chanceler Malestoit qui tomba à genou devant Eudes.
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeSam 30 Juil - 15:27
Charles d’Annequin vient me voir avec une proposition qui a de quoi me réjouir. Accepter Pierre en tant que page, ce n’est pas qu’un avantage pour le connétable, qui s’assure ainsi que l’un de ses enfants comptera auprès du duc ; c’est un avantage pour le duc aussi, qui va pouvoir se lier d’amitié avec le gamin, et l’influencer pour sa future vie d’adulte. Fut un temps, la pratique des pages permettait aussi d’échanger des otages, mais nous sommes plus civilisés de nos jours…

« Ma foi, oui, j’accepte votre fils comme écuyer. J’espère pouvoir le faire armer chevalier moi-même lorsqu’il deviendra adulte. »

Payer un destrier et un équipement de guerre d’exception à Pierre d’Annequin, ça ne sera pas si cher payé que ça dans les finances du duché ; et ça sera un cadeau dont il se souviendra toute sa vie.

« S’il est avec votre ost, présentez-le à Lescure ; je serai ravi de l’avoir parmi mes hommes. »








C’est si beau, j’ai presque cru à une arnaque. Un énième tour de passe-passe de Rattier. Mais non, assis sur ma cathèdre, je n’ai aucun effort à fournir, alors qu’un de mes nouveaux chevaliers me ramène l’objet de ma quête entièrement ligoté, des pieds à la tête.
Malestoit est redevenu ce qu’il méritait d’être : un pauvre hère mis à bas. C’est ainsi que l’ont puni les traîtres. Il y a de quoi se réjouir.

Le grand gagnant de toute cette affaire, c’est Pene-Penac. Si l’aristocratie de Cahogne est venue en rêvant de gloire, ils vont être déçus. C’est un félon local qui a sauvé la campagne du Vaujour. Et il sera récompensé à la hauteur de son service.

Une fois le petit discours de Ratier terminé, il y a un grand silence. Je me lève avec flegme, frappe dans mes mains, et m’exprime très fort pour me faire entendre de tout le monde : mon état-major, mes armées au garde-à-vous, les habitants de la ville venus voir qu’est-ce qui justifiait tout ce raffut.

« Sire Rattier de Pene-Penac ! Aujourd’hui, vous avez servi diligemment votre suzerain, le comte du Vaujour — et vous avez surtout servi dignement les habitants de cette province ! Vous me livrez un félon qui s’est rendu coupable de très nombreux crimes, et pour cela, je vous félicite !
Acclamez tous ce brave chevalier ! Acclamez tous sire Rattier ! »


Alors, les housecarles font un raffut du feu du Terme, en criant avec leurs grosses voix de Norses, et en tapant sur leurs boucliers. C’est si fort, ça tonne dans les cages thoraciques. À côté de ça, les applaudissements des chevaliers font pâle figure.

Je m’approche au-dessus de Malestoit. Je le regarde un moment. Ça serait le bon moment pour profiter de mon ascendant pour l’humilier davantage…
…Mais à quoi bon ? La mesquinerie est inutile. Ce pauvre abruti a assez souffert comme ça. Je me contente de claquer des doigts à l’attention de valets d’armes.

« Faites-le rentrer dans l’hôtel de ville. J’ai à lui parler en privé. »

On se saisit de sa corde, et on le traîne au loin.

Je m’approche de Rattier, lui tape sur l’épaule, et lui lance un grand sourire.

« Cela reste en privé entre nous, ne le répétez à personne — mais je pense que c’était une grossière erreur de mon père de s’empêtrer dans le Vaujour. Je fais la guerre à Landebroc parce qu’il est un bâtard qui ne respecte pas ses serments, mais je sais que nous, les Cahons, sommes des étrangers dans ce pays.
Vous en revanche… Vous vivez là. Vous avez servi dignement. Je me méfiais de vous, je ne vais pas vous mentir, mais vous m’avez prouvé comment vous étiez digne de confiance, et efficace.
Que diriez-vous, si je vous nommais sénéchal du Vaujour ? Si je vous confiais toute cette région, et que vous la gardiez et l’administriez pour moi ? Peut-être pourrions-nous en parler autour d’un verre ? »




Une fois Rattier en train de se faire mousser par mon état-major, je retourne dans le beffroi de Noyer-le-Grand. Dans une petite pièce à part, une dépendance, les valets ont déposé un Malestoit assis sur un tabouret, ensuqué et toujours aussi ligoté. Je rentre avec un page, qui porte une cruche d’eau.

« Avez-vous soif, capitaine ? »

Je ne pérore pas, et je ne me moque pas de lui. Ma voix est sèche, pleine de colère, mais s’il a soif, je demanderai à un de mes pages de le désaltérer — mais pour l’heure, il demeure ligoté.

« Pourquoi m'avez-vous trahi ? Ai-je raté un seul payement à votre compagnie ? Vous vous êtes gavé des années entières dans le Vaujour, et si vous vous étiez tenu tranquille, j’aurais pu vous mener à la guerre dans le reste du Valais, où vous auriez pu toucher d’autres soldes, des rançons et du butin.
Et à la place, voyez dans quelle situation vous me mettez ! Et dans laquelle vous vous êtes mis vous-même ! À quoi est-ce que vous pensiez ?! »


Je m’assois directement sur la table devant laquelle il a été posé.
Armarius
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitimeMar 2 Aoû - 17:45
L'ovation mesurée de la noblesse de Cahogne qui se contentait d'applaudir contrastait avec le brouhaha barbare des housecarles. Charles d'Annequin et les siens regardaient avec mépris ces guerriers étrangers qui avaient remplacé l'honorable garde sigillaire.
Le connétable était le plus modéré dans ses applaudissements, voyant en Pene-Penac un potentiel rival pour la suite de sa carrière. Lui qui avait servit l'ennemi, à peine avait-il rejoint les rangs des vassaux ducaux qu'il se trouvait acclamé par le duc. D'Annequin rongeait son frein en silence, pendant que son maréchal Eustache Brascourt avait réussi l'exploit de reprendre Noyer-le-Grand, Pene-Penac avait capturé Malestoit sous son nez en lui volant sa victoire...

« Je ne refuse jamais un verre monseigneur, répondit Rattier de Pene-Penac à son suzerain, surtout si c'est pour accompagner le plus des grands princes de l'Empire. »

La flatterie ne lui allait pas, ce n'était pas le genre de ce frustre borgne à la tignasse rousse. Il était clairement en opération séduction.
Alors que Eudes se dirigeait vers l'hôtel de ville où l'attendait le mercenaire félon, Robert de Lescure s'approcha.

« Monseigneur, dois-je vous rappeler nos coutumes chevaleresques : Malestoit est officiellement le prisonnier de sire Rattier, si vous voulez en disposer il faudrait le lui racheter ne croyez-vous pas ? »

On avait placé Malestoit dans une petite remise en suivant les ordres du duc. Il faisait peine à voir.
Cet homme était vraiment le capitaine qui avait tenu le Vaujour pendant deux ans ? Celui là qui avait servit dans la Grande Légion et qui selon ses dires fût fait chevalier par l'Empereur en personne ?
Malestoit cracha au sol un glaire de salive et de sang. La flèche qu'il avait reçu au flanc l'avait peut être touché aux poumons comme le laissait entendre sa respiration bruyante.

« Vous me posez vraiment la question monseigneur ? C'est vous qui m'avez poussé à la trahison... vous avez... lever une armée contre moi... vous m'avez envoyé un assassin...J'ai fait ce que j'ai pu pour maintenir l'ordre sur vos terres... et voilà comment je suis récompensé... le traître ici, c'est vous... »

Sa parole était saccadée, sa respiration difficile. Il avait le regard d'un homme défait, pas seulement vaincu militairement, mais aussi ébranlé dans sa confiance.
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MessageSujet: Re: La guerre du Vaujour : Claujacques La guerre du Vaujour : Claujacques - Page 3 Icon_minitime
La guerre du Vaujour : Claujacques
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