Le Deal du moment :
Jeux, jouets et Lego : le deuxième à ...
Voir le deal

Partagez
Aller à la page : Précédent  1, 2, 3, 4  Suivant
Eudes II de Cahogne
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 2 Fév - 15:01
La « pause sainte »… J’ai beau être un bien médiocre triaphysiste, je passe pour un exemple de piété et de dévotion à côté de Raymond. C’est ironiquement pour ça que je l’aime. J’ai toujours apprécié les gens marginaux, irrévérencieux, qui sont pas à leur place. Je les trouves passionnants. Comme ce frère Paul, un moine trop cynique pour la robe de bure. Comme Odilon, ce chambellan qui ne se contente pas que de gérer le linge de lit. Ou alors, cette damoiselle Sébire, une femme qui porte un pantalon d’équitation et un doublet, comme un homme.

Je cavale donc. Moins vite que les autres. Je profite de la ballade plus que je suis pressé de tuer un cerf, pour dire toute la vérité. Et visiblement, ça a l’air de profiter à certains. Hubert vient me voir, et, toujours aussi incertain et mal à l’aise, il se met à venir me réclamer quelque chose. Je le regarde avec les sourcils bien froncés, une lueur de hargne dans mon visage.

« Te faire chevalier ? Là, maintenant, ici, dans ce bois ? »

Puis je me déride, et sourit. Ce n’était qu’un moyen de le faire paniquer.

« Bien sûr que oui tu entres dans l’âge d’être chevalier ! Lorsque j’avais ton âge, j’ai pris la croix pour rejoindre ton père, c’est la fougue de la jeunesse, le moment où l’on doit se prouver. Et tu ne pourrais me faire plus grand honneur en revêtant les éperons et en accrochant pennon à ta lance. »


Je repose mes mains sur les rênes de mon cheval.

« Malgré tout, je ne peux pas accéder à ta demande. Pas encore. Je t’ai nommé maréchal en l’absence de Rodrigue, il y a une raison : Je crois que le Seigneur, parfois, cherche à nous tester par le destin. Si Rodrigue de Saint-Saëns s’est fait capturer par le mercenaire Malestoit, c’est qu’il y avait une raison. »


Je ne crois pas un traître mot de ce que je dis, mais je sais que mon cousin est un homme affable et pieux, donc sortir des bondieuseries est de bon ton.

« C’est un homme cruel, violent et hargneux, qui est puni pour ses péchés. Le Seigneur m’offre une occasion de te voir être testé, de vérifier ton audace et ton élan, de prouver que tu es un véritable chef de troupe au cœur vaillant, la nouvelle génération qui va remplacer les vieux intrigants comme Charles d’Annequin ou Mauger de Tancarvelles.
Je t’adouberai, Hubert ; Mais je t’adouberai sur le champ de bataille, où Dieu aura rendu son jugement par une ordalie de milliers de lances. Lorsque nous aurons vaincu la chevalerie de Valais, lorsque tu m’auras mit Landebroc dans une cage de fer, tu t’agenouilleras et je te donnerai l’accolade sur ton épaule. Alors, tu seras un véritable chevalier, et la Cahogne toute entière se souviendra de toi pour des générations.
Qu’en dis-tu ? »


Je cavale un peu plus en avant une fois ma discussion finie. Les chiens n’ont pas encore aboyé comme des fous furieux, ils ne trouvent pas encore de piste, je dois avoir quelques instants à profiter avant qu’on se mette à courir ventre à terre dans les bois.
Je me met au niveau de Sébire de Tancarvelles. Je vais la voir avec un petit sourire en coin, et prend une voix plus douce que d’ordinaire.

« Ma damoiselle, nous n’avions pas eu l’occasion d’être présentés. Vous n’étiez pas à Soulans avant mon départ pour la Croix ? »
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeLun 3 Fév - 8:31
Hubert sourit et fit un signe de tête compréhensif à son cousin.

« Bien sur je comprends. C'est un honneur de vous servir et de servir le duché. Je vous montrerais que le destin a bien fait les choses et que vous avez eu raison de me nommer maréchal. Je ne vous décevrais pas, je vous le promets. »

Hubert bomba le torse, tout fier d'être un élu de la providence. Son cousin avait raison, le Seigneur le testait avant de lui faire prendre en main son héritage.

« J'avais une idée aussi... »

Hubert voulu dire autre chose à son suzerain, mais celui-ci était déjà parti cavaler auprès de la jeune dame qui les accompagnait.
Sébire Tancarvelles était une énigme pour beaucoup d'hommes. C'était un chevalier avec des seins et de longs cheveux blonds. Elle préférait la compagnie des guerriers plutôt que des servantes, les tavernes bondées aux paisibles boudoirs, le fil de l'épée plutôt que le fil à aiguille. Eudes avait entendu parlé de l'affaire qui avait scandalisé la noblesse cahonne juste après son départ pour la croisade : un chevalier inconnu ayant remporté un tournois après avoir battu bons nombres des meilleurs jouteurs du pays s'était révélé être Sébire...

« Non monseigneur, j'ai grandit dans le Pays-Plat. Mais nous nous sommes déjà vu enfant, j'ai souvent accompagné mon père à la cour du duc Hugues. Mais il est vrai que je ne me souviens pas beaucoup de vous, j'ai plus en mémoire votre frère, Hugonet. »

Hugonet, l'héritier de la Cahogne, le fils aîné de Hugues III, le grand frère de Eudes.
En regardant ces arbres, Eudes se revoyait parcourir la forêt à ses côtés avec la "compagnie de la Jeune Epée". Il y a tout juste 10 ans, La compagnie était composée de Hugonet, le meneur, âgé de 17 ans, de Eudes et Lothaire, 11 et 9 ans, de leur cousin Raymond, 13 ans, et du filleule de leur père, Claude, 12 ans.  A l'époque ils tentaient d'imiter les grands, à chevaucher entre les arbres en poursuivant les lapins. Ils s'étaient même liés dans le sang, en se taillant la main, promettant de s'entre aider quoi qu'il arrive.
Eudes se souvenait que non loin d'ici se trouvait un lac où la compagnie avait l'habitude de se retrouver avec les "dames", Jeanne, l'aînée avec ses 14 ans, puis Blanche et Clotilde, 12 et 11 ans.
Cette époque était révolue à présent.

« Je me souviens que la vue de l'héritier du duché avait fait palpiter mon petit cœur de jeune fille. Je me rappelle encore de ses longs cheveux de jais, de ses épaules larges, de sa haute taille. Votre frère était vraiment bel homme. J'ai été très peiné d'apprendre sa mort. »

La disparition d'Hugonet avait montré à Eudes que la virilité, la puissance physique, le courage et la vaillance épée en main ne sauvegardaient pas de la mort. Une simple maladie avait réussi à emporter l'enfant prodige de la Cahogne, et tout le pays l'avait pleuré...
Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
Fiche : Fiche
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeLun 3 Fév - 17:05
Le rappel du souvenir de Hugues me fait froncer les sourcils, et serrer les dents. C’est une des rares émotions que je ne peux feindre. La tristesse que j’éprouve à la disparition de mon grand frère est tout ce qu’il y a de plus sincère.

« Il était tout cela. Et plus encore : Il était noble, courageux, preux. Il aurait été un duc excellent.
Je ne suis pas fait pour les éperons que votre père va me remettre. »


Je détourne un peu le regard, pensif. Une vilaine nostalgie triste s’est emparée de moi.

« Votre frère est en ce moment même en train de lever des troupes en Transgarde. C’est un brave homme votre frère, je l’apprécie beaucoup.
Est-ce que vous nous ferez l’honneur d’accompagner notre ost pour punir le Valais ? »


Alors que Sébire allait répondre, on entends les chiens se mettre à aboyer, au loin. Raymond trépigne d’impatience. Pierre aussi. Je les comprends, tous ; Ils veulent avoir l’honneur d’être les premiers à briser quelque chose avec leur lance. Moi je ne partage pas du tout leur impatience, mais il faut avouer que le jeu est amusant. Un sourire commence à se dessiner sur mon front.

« Ah, on dirait que ça va galoper dans un instant. Vous me répondrez plus tard. »

Le veneur siffle. Ses valets s’activent. Raymond prend une lance d’arçon dans sa main, et après un instant, nous nous mettons à courir à travers les arbres, les sabots de nos chevaux éclatant des ronces et des branches au sol. On essaye de débusquer quelque chose à travers les épais feuillages.
Je colle Raymond de très près. Nous nous éloignons du groupe, alors qu’il me siffle et m’encourage à courir à la même vitesse que lui. Au bout d’un moment, à sa grande frustration, on se rend compte qu’on n’a pas suivi la bonne piste, alors qu’on entend aboyer un peu plus loin : Sébire, Hubert ou Pierre a peut-être été plus chanceux que nous.
Raymond veut se dépêcher de filer, lorsque je l’arrête pas une simple phrase, tandis que je reprends mon souffle :

« Quand est-ce que tu comptes me demander la main de Jeanne ? »
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeLun 3 Fév - 23:52
Raymond adorait ça, courir après le gibier, sentir le vent lui fouetter le visage, ne faire plus qu'un avec sa monture.
Mais cette fois-ci il fût malchanceux. Lorsqu'il se rendit compte qu'il suivait la mauvaise piste, il ralentit l'allure pour constater qu'il s'était éloigné du reste du groupe avec pour dernier compagnon son cousin Eudes.
Raymond afficha un large sourire, le visage empourpré par l'effort.

« Quel plaisir de pouvoir chevaucher de nouveaux avec toi Eudes ! »

La mémoire de Raymond était elle aussi remplies de souvenirs ravivés par ces lieux. Il y a 10 ans c'est avec Hugonet qu'il chevauchait en avant, s'imaginant affronter des hordes d'infidèles sur un champ de bataille virtuel. L'aîné des fils du duc avait été pour lui un modèle, l'idéal à atteindre, mais surtout son meilleur ami.
Il s'apprêtait à repartir de plus belle lorsque son cousin lui lança un poignard verbal. Raymond effaça son sourire.

« Qu'est ce que tu insinues Eudes ? Jeanne est ma cousine, pourquoi irais-je te demander sa main ? »

Raymond tira sur la bride de son cheval pour l'approcher de celui de Eudes. Il avait le regard mauvais, il n'avait pas apprécier la question qui mettait en doute sa droiture de chevalier.

« Et c'est ta sœur, ce serait te manquer de respect que de la courtiser. Jeanne et moi ne sommes que de bons amis. Qui t'a mit ça en tête ? Blanche ? »
Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
Fiche : Fiche
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeMar 4 Fév - 0:06
J’exhale, reprend un bon rythme respiratoire. Je me redresse dans ma selle, et lance un merveilleux sourire à Raymond, alors même qu’il se met à me parler avec une colère naissante. Je le regarde droit dans les yeux, tout en hochant de la tête.

« Tu me rassures grandement, à me rappeler que tu t’attaches à me traiter avec respect. C’est cette réaction que j’attendais de ta part, elle me retire un poids pour ce que je compte faire prochainement. »

Je vois l’incompréhension dans son regard, alors je continue.

« J’ai des projets de mariage pour Jeanne, elle commence à dépasser l’âge où elle est censée se trouver un époux. Toi-même, je pense que ton père a prévu de t’assurer une place avec une bonne dame qui soit de ton rang.
J’avais très peur que cette nouvelle ne… Mette mal à l’aise l’un de vous deux. Tu as raison alors, je ne me suis fait que des idées idiotes. »


Je ne le quitte pas des yeux. J’en sous-entend plus dans mon regard que dans mes paroles. Je suis sûr qu’il voit très bien où je veux en venir.
Comparé à Hugues, j’ai toujours été comme ça. Moins honnête. Légèrement plus… Plus comme Blanche.

Je fais un petit signe de tête vers les aboiements des chiens.

« Ton dix-cor va filer. »
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeVen 7 Fév - 8:51
Raymond fit une grimace et serra la bride de son cheval à la déchirer.

« Des projets de mariage ? »

On sentait bien qu'il contenait sa colère.

« Et bien tu es le chef de famille à présent, c'est à toi d'en décider. »

Puis il fila rejoindre les autres.
Eudes le suivit jusqu'à retomber sur Hubert, Sébire, Pierre et Odilon. Eux avaient suivi une autre piste, mais tout aussi infructueuse. Le grand veneur et ses valets étaient un peu plus loin, les chiens aboyaient toujours après la chimère des bois.

« Vous aussi monseigneur vous avez fait fausse route ? interpella Pierre d'Annequin. Ce cerf n'est pas loin je le sens.
- A moins que ce ne soit les lutins qui nous trompe.
 » le piqua Sébire, plein de sarcasme dans le ton. Pierre ne lui répondit que par un regard méprisant.
Alors que la troupe repartait vers les aboiements pour y poursuivre le cerf imaginaire, Hubert s'approcha de Eudes.

« Cousin Eudes, je... »

Mais avant qu'il n'ait pu se faire entendre du duc, Odilon lui été passé devant.

« Monseigneur. Si je peux vous dire un mot. Je vous avoue que ce n'est pas par pur plaisir de la chasse que je vous ai accompagné. J'aurai aimé vous parler de Népotain, sur lequel vous m'avez chargé d'enquêter. J'ai apprit que vous aviez mandaté Rigaud Dents Blanches. Mais j'aurai pu vous être encore utile sur cette affaire. Comme je vous l'ai dit j'ai plusieurs contacts à l'endroit où maître Népotain passe son temps libre. Je sais aussi que le sire de Saint-Saëns dispose d'une femme à son service, Samara, qui pourrait nous servir à piéger le médicastre. Qu'en pensez vous ? »
Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
Fiche : Fiche
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeSam 8 Fév - 15:05
Raymond est trop touché par ma réponse pour être honnête. Ça se voit que ma phrase l’a blessé. Mais il était temps de faire sauter sa bulle ; S’il n’était pas prêt à épouser ma sœur, qu’il la lâche au lieu de mettre en danger sa réputation en lui rôdant autour, à jouer au preux chevalier servant.
Vous me direz que je suis terriblement hypocrite : J’ai une maîtresse infidèle, un bâtard qui a vu le jour, et je n’hésite pas à jouer à un jeu dangereux avec mes phrases scabreuses, en public, autour de ma sœur. Mais l’hypocrisie c’est la valeur de la civilisation. C’est ce qui est réservé aux puissants.

Aucun de mes collègues n’est parvenu à rejoindre le Dix-Cor. Je rigole devant nos échecs communs, et alors que tout le monde s’enfuit pour retourner galoper, voilà qu’Odilon m’arrête. Il me donne des informations sur le Népotain, dont il faudra s’en occuper. J’approuve en hochant la tête.

« Samara… Il me semble que c’est l’agent que Cécil a envoyé dans le Vaujour ? Elle risque d’être occupée là-bas un long moment, il y a une toile que l’Aragne doit tisser avant que je ne débarque avec mes chevaliers.
Qu’entendez-vous par piéger, très exactement ? »


Je réfléchis à moi-même, en me grattant le menton.

« Vous avez des contacts avec les prostituées, n’est-ce pas ? Si je détournais de l’argent du Trésor vers vous, pourriez-vous me rendre quelques services ? »
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeSam 8 Fév - 15:46
Tranquillement Odilon faisait marcher son cheval à côté de celui de son suzerain. Pierre et Sébire avaient prit la tête de la chasse, Raymond était songeur, l'esprit ailleurs. Hubert suivait Odilon et Eudes, attendant son tour pour pouvoir parler à son cousin.

« Bien sûr, je vous l'ai dit dans ma lettre, j'ai été en partie élevé par ces femmes, je les connais très bien.
Par piéger j'entends le prendre la main dans le sac en organisant nous même un traquenard.
Je pense que si Népotain négocie avec Picquy ce n'est pas pour lui même mais pour son frère, le consul de la Hanse. Si la Hanse est impliquée dans de la contrebande de vin et que nous l'apprenons, avec des preuves formelles, vous pourriez vous considérer comme lésé. Ce serait un moyen de pression sur le consul, et c'est toujours intéressant d'avoir de l'influence sur ceux qui disposent des la monnaie.
 »

Au loin, les valets du grand veneur et leurs chiens s'étaient de nouveau activés. La piste du cerf avait reprit. Pierre et Sébire partirent au galot.

Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
Fiche : Fiche
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeSam 8 Fév - 17:34
Je hoche la tête à ce que dit Odilon.

« C’est certain. Les mettre aux fers et démanteler la contrebande serait une entreprise fort coûteuse, mais garder des preuves qu’ils la pratiquent pour les forcer à se montrer plus… Avantageux avec le duché serait sans aucun doutes un gain gigantesque.
Je ne connais pas tellement maître Rigaud. J’ignore quel genre d’animal il est, ni quelles sont toutes les personnes à ses gages. Vous m’avez juré votre loyauté, elle me plaît et vous verrez qu’elle sera fortement récompensée. Dites-moi ce dont vous avez besoin et occupez-vous de trouver de quoi étrangler la Hanse et Népotain. Vous avez carte blanche. »


Je tourne ma tête vers Hubert qui me suit timidement depuis tout à l’heure.

« Qu’est-ce qu’il y a, mon cousin ? »
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeSam 8 Fév - 20:13
« Rigaud est un truand, un de ceux de la pire espèce. Mais c'est un homme intelligent, et c'est avant tout un "commerçant". Il aurait trop à perdre à jouer contre vous. Le seul ennui c'est si l'on apprend que le duc collabore avec la pègre, cela ferait mauvais genre.
Je pourrais peut être vous le présenter ?
 »

Au loin on entendait les sifflés des valets. Le cerf était tout proche et Pierre d'Annequin et Sébire étaient à ses trousses. Raymond semblait montrer moins de cœur qu'au début de la chevauchée, les projets de son cousin l'avaient bouleversé.

« J'aurais certainement besoin de quelques fonds pour récompenser les filles du Chenil. Pourriez vous aussi m'autoriser à collaborer avec votre bureau secret ? Le sire de Saint-Saëns a des ressources qui me seraient utiles.
Voulez vous agir contre Lanfranc de Picquy aussi ? Il est l'instigateur de la contrebande de vin.
 »

Voyant Hubert les suivre à la trace, Eudes interrompi la discussion pour lui demander ce qu'il voulait.
Celui-ci balbutia.

« Oh je ne voulais pas vous interrompre. Continuez je vous prie.
- Allez-y monseigneur. Si vous désirez parler à votre cousin, le comte de Vaudrincourt devrait toujours avoir la primauté sur un simple chambellan.
 »

Modestement, Odilon le Chétif laissa sa place au jeune Hubert.

« Monseigneur... cousin Eudes. Je voulais vous parler du sire de Toussaint. Je... il m'est venu une idée. Vous le savez certainement, il est de tradition que le sacre d'un duc soit l'occasion de gracier quelques prisonniers. Je me disais que Claude de Toussaint pourrait faire parti de ces élus de votre miséricorde. Vous pourriez proclamer sa grâce à l'issu de votre sacre et le libérer de ses fers. Enfin, je ne sais pas... »
Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
Fiche : Fiche
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeSam 8 Fév - 20:33
« Bien sûr que vous obtiendrez de l’argent. Et vous avez mon autorisation pour collaborer avec le Bureau Secret. Mais il faudra que vous géreriez le sire de Saint-Saëns. Il est mon vassal et m’est normalement loyal, mais j’aimerais malgré tout que vous gardiez le plus possible notre affaire secrète.
Les secrets forment qui nous sommes, je ne vous apprends rien. »


Alors que le chambellan s’éloigne au petit galop, il me laisse avec Hubert, à qui j’offre un beau sourire.

« On peut se tutoyer, non ? Pas besoin d’autant de familiarités !
On a beaucoup de temps à rattraper toi et moi. »


Sa proposition me laisse songeur. Je hausse les épaules, indécis.

« Je ne sais pas trop… Il est vrai que la grâce fait partie de mes pouvoirs. Personne ne pourrait la contester.
Mais donner la grâce à Claude, c’est reconnaître qu’il est coupable. Définitivement. C’est laisser une marque qui le souillera, là où je pense que mon vieil ami préférerais que son innocence soit reconnue devant le Parlement, par un vrai procès. Je ne sais pas trop. J’aimerais lui en parler, mais malheureusement mon sacre aura lieu avant que je ne puisse descendre le voir en Argentière. »


Je continue de le regarder, et lui offre un sourire plus doux, et plus taquin.

« Tu es bientôt en âge de devenir comte, et chevalier. Mais tu es également bientôt en âge de te marier. Tu mérites une bonne épouse de haute lignée.
Un beau chevalier comme toi, tu dois déjà avoir des prétendantes, non ? »
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeSam 8 Fév - 21:04
Hubert rougit.

« Oh euh... me marier. Non je n'y ai jamais vraiment réfléchi encore. Il est vrai que je suis en age, mais je ne sais pas si j'ai mérité l'amour d'une dame, je n'ai encore rien accompli à la guerre ni en tournois. Si je dois trouver une épouse j'aimerai quérir son amour d'abord par quelques exploits. »

Au loin on entendait les beuglements des chiens et les cries des chasseurs. La bête était en vu.

« Lorsque vous êtes parti monseigneur... enfin... je veux dire lorsque tu es parti, je n'avais que 11 ans. Je n'ai que quelques souvenir de toi. Je me souviens plus de Lothaire.
Mais je reconnais mon oncle en toi, c'est rassurant. Hugues a été comme un père pour moi lorsque le mien a décidé de rejoindre la Ponantique. As tu des nouvelles de lui ?
 »
Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
Fiche : Fiche
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 1:09
J’offre un bon sourire à Hubert.

« Je n’ai pas eu de nouvelles de ton père depuis mon retour. Mais lui et moi nous sommes battus ensemble durant ces longues années passées en Outremer. Il était un vrai lion, plein de pugnacité et de vaillance au combat, mais également généreux, amical et doux avec ses frères Porte-Croix lorsqu’il ne se battait pas. Miséricordieux envers les prisonniers, épargnant les innocents et les désarmés, mais ne retraitant jamais tant que l’ennemi face à lui n’a pas été occis, peu importe leur nombre.
J’espère que tu auras hérité de ses traits. Car je plains les chevaliers du Valais qui devront affronter un Vaudrincourt. »


Je galvanise Hubert. J’en ai besoin. J’ai envie qu’il soit prêt, à fond, pour le combat que nous nous apprêtons à mener.

« Maintenant tais-toi et galope. Les chiens ont reniflé quelque chose – Tu ne vas pas laisser Pierre ou Sébire te voler la part du lion, tout de même ? »
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 11:59
Hubert fit un signe de tête à son cousin, affichant un large sourire, puis obéit en tirant sur la bride de son cheval.
Cette journée de chasse, comme au bon vieux temps de la jeunesse du duc, s'était terminée par la prise d'un animal. C'était Sébire qui avait réussi à harponner un jeune cerf. Pierre n'hésita pas à critiquer la taille de l'animal, plutôt modeste, jaloux de la victoire de la jeune femme, touché à la fois dans son orgueil de mâle et son orgueil d'Annequin.
Puis la troupe s'était rentrée au palais. Le soir, lors du banquet, on servit du cerf à Sébire.



Eudes passa les dix prochains jours occupé à régler les affaires du duché. Son temps était partagé entre les cas ordinaires et les préparations de son sacre. Il avait notamment reçu plusieurs tailleurs Valentins qui lui proposèrent tour à tour différents costumes ; puis Daguerre était venu lui présenter la liste finale des invités et le repas qu'il était prévu de servir après la cérémonie ; enfin, un architecte lui montra le jubé de bois qui allait fermer le choeur de la cathédral de Vendaume, sculpté spécialement pour l'occasion.
Après plusieurs journées à travailler, Eudes s'octroya un peu de repos. Une troupe de théâtre itinérant avait été invité par Blanche à jouer au palais. Dans une grande salle on avait installé une scène devant des rangés de fauteuils. La représentation avait attiré les grands nobles du duché présents à Soulans. Blanche occupait le premier rang avec ses courtisanes, juste à côté de Eudes, assis sur sa cathèdre réservée. Jeanne avait insisté pour s'installer à la gauche de son frère. Derrière le duc se tenaient ses principaux conseillers, seul Espien de Raysac manquant à l'appel.
La troupe, originaire de Morcaen sur la côte du Pays-Plat, était venue présenter une nouvelle version de l'histoire de la chute d'Oor, cette ville légendaire ensevelie par les cendres du Piton, le volcan de la Crête. Une belle jeune femme, grande et blonde, jouait la Grande Pécheresse, fille du roi Béothas, s'opposant à saint Adrien, jouait par un acteur muni d'une fausse barbe et la tête surmontée d'une auréole tenue en l'air par une tige.
Nous en étions arrivé à la fameuse scène où le saint admonestait les habitants d'Oor à quitter les lieux, à abandonner leur ville sacrilège et à se détourner de la Grande Pécheresse -une scène bien connue de tous les jeunes chevaliers de Cahogne- lorsque Jeanne se pencha à l'oreille de son frère.

« Eudes... j'aurais aimé te parler d'une chose qui me tracasse.
C'est un peu délicat. C'est à propos de maman. Je la sais sous l'influence d'un clerc étrange et cela m'inquiète beaucoup. Tu l'as peut être remarqué, il la suit comme une ombre, toujours pieds nus.
Je pensais au départ qu'il s'agissait d'un simple prêtre judicalien, mais j'ai peur qu'il ne soit l'un de ses schismatiques qui habitent les Landes depuis peu. Tu penses que maman pourrait être une partisane de l'hérésie ?
 »
Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
Fiche : Fiche
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 12:50
On a fait la fête pour Sébire. On lui a rendu les honneurs qu’on doit à un admirable chasseur ; C’était assez étrange. Normalement, les réjouissances de chasse sont fort viriles, paillardes, très peu mondaines. On rit, on boit comme des trous, on chante comme des dégénérés en se tapant dans le dos. Pas de courtisans, pas de valets apprêtés, on agit comme les barbares que nos ancêtres étaient. Pourtant, Sébire, avec ses longs cheveux et son joli visage, ne détonne pas. Les Tancarvelles ont dû l’éduquer comme un garçon, sans robes ni maisons de poupées. Elle n’a pas hésité, elle-même, à se moquer gentiment de Pierre d’Annequin, en le tapant dans le dos, ivre qu’elle était – comme des hommes le feraient entre eux. Une femme impressionnante, Sébire. C’était une jolie fête, même si elle aurait été sans doute plus belle encore si Raymond n’était pas resté dans son coin, et ne s’était pas volatilisé discrètement. C’était fort étrange de sa part, lui qui était d’ordinaire le plus fêtard de nous tous. Au moins, ça m’a permit de me rapprocher de Hubert et des autres chasseurs. Passer un peu de bon temps avant que nous ne partions dans le Valais, sur les sentiers de la guerre.

Je me suis réveillé avec une énorme gueule de bois, mais Dieu merci, les prochains jours ont été plus reposants et habituels. Je suis allé me faire pardonner de mes fautes à la chapelle, j’ai traité des affaires courantes, et j’ai passé du temps avec Arda et Albert. Elle est plus triste et solitaire que d’ordinaire. Inquiète. Je la comprend. Il faut que je règle notre histoire. Mais je n’ai encore aucune idée de comment.

Blanche, comme d’habitude, a du bon goût. J’assiste à une magnifique représentation. Pas tellement le sujet qui m’intéresse – l’histoire est vue, et revue. Plutôt l’actrice principale qui me tape dans l’œil. Je la dévore un peu du regard. Et je me permet un instant de faire amener mon chambellan d’un petit geste du doigt. Odilon amène son oreille tout près de ma bouche pour que je lui chuchote :

« Vous la ferez amener dans mes quartiers privés après la représentation, que je la félicite. »

Alors que je me profite du spectacle et me détend, ma petite Jeanne, fort inquiète, me chuchote quelque chose dans l’oreille. C’est à propos de maman. Je la regarde avec les lèvres pincées, et lui répond, assez sèchement :

« C’est évidemment un hérétique. Étienne du Lac on l’appelle, un homme qui publie des choses dangereuses, qui lui attireront inévitablement des ennuis. »

Je me rends compte de ce que je dis peut inquiéter ma petite sœur, alors je pose ma main sur la sienne et la regarde droit dans ses pupilles.

« Allons, Jeannette. Notre mère n’est pas un évêque, elle n’est pas une prédicatrice. Elle ne va pas écrire des pamphlets qui lui attireront l’œil de l’Église.
Mais il est vrai que je n’aime pas que ce moine la suive… Qui sait ce qu’il peut lui demander ? Peut-être qu’il va la manipuler pour obtenir des faveurs. Tu désires que je m’occupe de lui ? »
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 13:14
Jeanne fronça les sourcils.

« Que veux tu dire par "m'occuper de lui" ? Tu sais que je n'aime pas la violence ! »

Il était amusant de voir la différence de caractère entre Jeanne et Blanche. A sa droite, Eudes avait un petit diable, à sa gauche, un véritable ange.

« Non, je ne veux pas que tu t'occupes de ce prêtre, je veux que tu t'occupes de maman. Tu étais donc déjà au courant et tu n'as rien fait ? Tu pourrais essayé de voir ce qu'elle en pense, la raisonner peut être. Tu as été plutôt distant avec elle depuis que tu es rentré. »

Jeanne afficha un regard triste. Elle avait toujours cet air mélancolique hérité de sa mère.

« Tu sais, ça a été dur pour maman ces dernières années. La perte de son fils aîné, le départ à la guerre de ses deux autres fils, la mort de son mari... il ne faut pas lui en vouloir de s'être tourné vers ce moine. »

Sur la scène, le pseudo saint Adrien s'adressait à la Grande Pécheresse, lui ordonnant de cesser sa dépravation pour sauver sa ville du volcan. L'actrice était bien choisie, il était crédible qu'une ville entière tombe dans la luxure pour elle. Elle était mince et élancée, des jambes longues, une taille parfaite. Ses traits étaient fins, sa bouche pulpeuse, son nez droit, ses yeux d'un bleu profonds surmontés de long cils noirs. Elle semblait sculptée dans du marbre blanc par l'un de ces maîtres de l'antiquité. Dans sa voix pointait un léger accent Valentin, ce qui laissait suggérer ses origines.
Elle ne devait pas dépasser les 20 ans.
Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
Fiche : Fiche
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 13:25
Je lève la main et fait un petit geste pour calmer Jeanne.

« Pas de violence. Non. »

Bien que cela m’ennuie. J’ai le pouvoir de régler mes ennuis par la violence. Mes Housecarles sont plus simples que des débats théologiques ennuyants. Ils méritent bien leurs gages.

« Je veux bien aller discuter avec mère, mais je ne promet rien. Je ne peux pas permettre à la Cahogne d’être meurtrie par un esclandre, tu comprends ? Étienne du Lac doit partir, pas forcément avec violence, mais il ne peut pas rester à Soulans, ni près de ma mère.
J’irai lui parler après la représentation. »


Comme je suis un hypocrite. À critiquer les risques d’humiliation de la part de ma famille. Alors que j’ai Arda.

« Tu n’as pas d’autres choses à me dire ? »

Je ne lui parle pas directement de Raymond. Mais je lui lance un regard bien long, et plein de sous-entendus.
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 13:44
Jeanne écarquilla les yeux, marquant son incompréhension.

« Que veux tu dire ? Non.
Ce n'est pas plutôt à toi de me dire quelque chose ? J'ai entendu parler de tes grands projets tu sais.
 »

Sur la scène, le pseudo saint Adrien était en extase, agenouillé et les mains jointes, à prier Dieu pour sa miséricorde, qu'il pardonne les habitants d'Oor et retienne la Géhenne sur ces pauvres âmes perdues. Mais tout le monde connaissait la fin de l'histoire, le volcan n'allait pas tarder à se réveiller pour engloutir sous les cendres la ville corrompue.

« Si c'est ce que tu veux, je me plierai tristement à ta volonté. Je remplirai ma tâche, en tant que sœur du duc de Cahogne. Comme cette actrice je jouerai mon rôle, même s'il m'en coûte. »

Jeanne semblait abattue, résolue à vivre aux côtés d'un mari violent et idiot.
Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
Fiche : Fiche
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 13:53
« Et toi, qu’est-ce que tu voudrais ? »

Ma phrase est étrange ; Elle a un mélange de colère et de gentillesse. Aigre-douce. C’est que moi-même, je ne sais pas comment réagir. Je n’étais pas censé être chef de famille. Je m’entendais bien avec tout le monde : Jeanne, Blanche, Lohaire, Huguonet… Ils étaient tous très différents, mais j’étais le petit du milieu, je pouvais me permettre d’être agréable et accorte. Je n’avais pas de responsabilités.
Les choses sont différentes de nos jours. Je ne peux pas rester l’Odilon sympathique.

« Tu n’es pas la sœur du Duc de Cahogne. Tu es ma Jeannette. Je te verrai toujours comme ma Jeannette. Tu peux avoir l’homme que tu veux – et même si tu épousais quelqu’un contre ton gré, il serait forcé à jamais de te traiter avec amour et respect, sous peine de devoir m’affronter moi. »


Mes yeux se détournent de Jeanne pour regarder la Grande Pécheresse. Quel imbécile ce Saint Adrien. Elle est belle à offrir un duché pour elle.

« Je ne suis pas père. Je ne demande rien de toi, sinon ton honnêteté et ton affection.
Père il t'aurait marié à ce rustre Dragomir pour garder la Transgarde, si on le lui avait proposé. C'est bien pour lui échapper que je suis parti de l'autre côté de la mer. »


Ma voix retient une certaine colère. Du fiel. Du fiel envers mon paternel, qui bout. Je n'ai pas aimé la manière qu'a eu Jeanne de jouer au chien battu. Petite Jeanne, douce Jeanne ; Blanche est une salope, mais au moins elle ne me parle pas comme un sire. Depuis que je suis rentré, voir Raymond me traiter avec méfiance, et à présent ma sœur que j'aime...
J'ai du mal à le supporter.
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 14:29
« Cesse de feindre d'être différent de lui. Pourquoi ne m'as tu pas parlé de tes projets avant de tout décider. Tu l'as dit à Blanche et à Raymond, et même pas à moi, la première concernée ? »

Sur la scène, le volcan était entré en éruption. Le décors de carton lançait des gerbes de papiers rouges et des confettis censés représenter la cendre s'abattant sur Oor. Le public était impressionné, certains horrifiés par le sort réservé aux pécheurs. Blanche ricanait, elle plaisantait avec l'une de ses courtisanes, quelque peu distraite, à moins qu'elle ne s'amusait à voir brûler les hérétiques.

« Ne me laisse pas croire que j'ai le choix. Qui vas tu lui faire épouser si je ne me dévoue pas ? Blanche ? Alix ? Je ne veux pas qu'elles subissent ça. »
Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
Fiche : Fiche
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 14:41
Je répond à Jeanne du tac-au-tac, sans la regarder dans les yeux, trop subjugué que je suis par ce qui se joue sur scène.

« Ou peut-être bien que j’épouserais Sébire, pour m’allier à cette brute de Mauger. J’aurai comme épouse une garçonne qui boit et qui rit comme un homme – Ou bien peut-être est-ce que j’aurai la chance d’épouser une infirme avec une grosse dot, ou bien une pauvre gamine plus jeune qu’Alix qu’on arrache à sa famille pour permettre à des gros marchands ou des nobles vénériens de faire leurs commerces d’influence.
Crois-moi que je regrette chaque jour que Huguonet soit parti avant moi. J’ai vécu les pires, mais surtout les meilleures années de ma vie en Outremer. »


Je détourne enfin mon regard de la scène pour à nouveau voir ma sœur droit dans les yeux.

« Je ne souhaite pas que tu passes le restant de tes jours à prendre ton mariage comme une croix à porter. Si tu épouses ce lourdeau d’Eustache, c’est parce que tu l’auras décidé. Parce que tu te convaincras que pour toutes ses manières de rustre attardé qui ricane comme un demeuré lorsqu’il voit des pauvres garçons se faire écrabouiller par un taureau, tu es capable de le transformer en époux qui te traitera avec le respect et qui t’offrira l’amour que tu mérites.
Je ne dis pas ça comme un preux chevalier naïf. Je le pense sérieusement. Tu ne cesseras jamais d’être ma sœur – et on n’offre pas moins à ma sœur. »
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 15:02
« Ce serait tellement plus simple si tu m'obligeais à l'épouser. Tu me connais, tu sais très bien que je vais le faire, c'est mon devoir. Tu ne veux juste pas avoir de remord à donner ta sœur à un rustre. Moi aussi j'aurai aimé qu'Hugonet te survive, il ne m'aurait jamais fait ça. »

Le spectacle était terminé, ne laissant pas le temps à Eudes de répondre. Le public se leva pour applaudir les acteurs. Sans un mot de plus, Jeanne quitta la salle, visiblement fâchée. Avant qu'il n'ait pu la rattraper, Blanche lui attrapa la main avec un large sourire.

« Comment as tu trouvé le spectacle Odilon ? Impressionnant ce volcan en éruption, bien mieux que l'année dernière. Veux que je te présente à dame Ensellina ? C'est une amie. C'est la plus grande actrice de sa génération. »
Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
Fiche : Fiche
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 15:18
Jeanne me brise le cœur. C’est le talent de ma famille : J’accepterais la ire de n’importe qui. Mais pas des gens que j’aime. Elle me fait broyer du noir. Je n’ose rien dire, car la séance est terminée, car les applaudissements et les acteurs qui viennent saluer l’audience me rappellent que je suis en public. J’étais à deux doigts de crier. De faire une scène. Une tragicomédie avec des larmes pour rivaliser avec la représentation de la troupe.
Mais non, rien de tout ça. Juste moi et mes idées noires. Je soupire et regarde un long moment mes pieds. Avant de forcer un faux sourire, et jouer la comédie perpétuelle que j’aie envers tout le monde.

De toute façon, Blanche m’empêche de poursuivre Jeanne. Je la salue en opinant du chef.

« Même le cuistre que je suis le reconnaîtrais, ma Blanche. Je serais plus que ravi de la rencontrer.
Peut-être autour d’un verre de vin, avec toi ? Avant il faut que j’aille parler quelques minutes avec maman, tu permets ? »


On remet donc cette rencontre dans un instant. En attendant, je me lève de mon siège et parvient à me faufiler discrètement au milieu des gens debout à applaudir. Je m’éloigne jusque dans les couloirs inhabituellement vides du château, gardés uniquement par quelques sentinelles en faction. Discrètement, et sans dire un mot, deux Housecarles se placent immédiatement dans mon dos et marchent à quatre pas de moi : Où que j’aille, il y a toujours ces grands messieurs pour aller dans le décor et se relayer pour constamment avoir un œil sur moi ou les personnes qui s’approchent de moi. Le meilleur moyen pour éloigner furtivement quelqu’un d’imprudent en lui faisant une clé de bras.

Ma mère est censée assister à la représentation. Mais je ne suis pas sûr qu’elle ait apprécié tout ce faste, ces explosions, ces effets pyrotechniques que de savants alchimistes ont su mettre au point – encore moins la beauté de la Grande Pécheresse. Je devine qu’elle n’a fait que acte de présence, et désire à présent se retirer au plus tôt. Pour quoi faire ? Aller prier ou parler avec ce sale moine qu’elle a amené dans ses bagages ? Je lui tend un guet-apens, en fait. Mains dans le dos, j’attends qu’elle montre sa tête, et ça n’y trompe pas. Elle tombe sur son fils bien habillé, en majesté, avec ses gros bras qui se tiennent derrière. Je lui fais un signe de la tête et lui parle poliment, alors qu’elle s’étonne de me voir :

« Mère. As-tu apprécié la représentation ?
Je me permet, je vais t’escorter jusqu’à ta chambre à travers les jardins. »

Je ne lui laisse pas vraiment le choix. Un des Housecarles ouvre la petite porte qui mène sur un balcon. Cela nous permet de marcher lentement, alors que je lui offre un bras qu’elle ne saurait pas refuser. Et nous nous éloignons de la foule et de la pierre qui réverbère les mots dans un écho, pour profiter du calme et de la sérénité de la nuit.
J’attends de bien être dehors pour parler de tout et de rien.

« Nous n’avons pas eu le temps de trop nous voir ces derniers temps… Être duc représente tellement de responsabilités.
Comment vas-tu ? Que penses-tu du palais ? Tout le monde est bien à ton service, tu ne manques de rien ? »
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 16:20
Constance était seule, mais du Lac ne devait pas être bien loin. Elle accepta le bras de son fils et le suivit dans les jardins.

« Oui mon fils, je vais bien, merci de ta sollicitude. Cette pièce était... intéressante. Même si l'on a dû me raconter cette histoire plus de cent fois maintenant... »

Constance était la mère de Eudes, elle l'avait fait. Elle connaissait son fils mieux que quiconque et savait pertinemment que cette rencontre n'était pas dû au hasard.

« J'ai été mariée à un duc pendant des années, je sais ce que c'est. Je te remercie d'accorder un peu de ton temps à ta vieille mère. Mais j'imagine que ce n'est pas par pur plaisir, tu as quelque chose à me dire ? »
Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
Fiche : Fiche
Messages : 369
Date d'inscription : 18/12/2019
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 16:30
« Pourquoi est-ce qu’à chaque fois que je passe du temps avec ma famille, ils pensent que j’attends quelque chose d’eux ?
Tu vois, mère, c’est pour ça que j’ai toujours préféré passer du temps avec Blanche. »


Je feins de ne pas être au courant de ce qu’elle a noté. Mais c’est vrai que je suis un peu vexé et à cran. Je soupire, tout en tenant bien le bras de ma mère.

« Mais oui. Jeanne était inquiète. Elle m’a demandé de venir te voir, elle trouve que je ne passe pas assez de temps avec toi. Que je t’ai un peu… Abandonnée. Déjà partant cinq longues années en Croisade, où j’aurais bien pu ne jamais rentrer. Et depuis que je suis revenu, on ne peut pas dire que j’aie été bien présent…
Je suis désolé. J’avais mes raisons pour partir. Je ne suis pas encore sûr de les avoir toutes résolues en revenant. Pas plus que Lothaire.

Est-ce que tu m’en veux ? »
Armarius
Armarius
Messages : 1020
Date d'inscription : 07/07/2017
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitimeDim 9 Fév - 19:58
« Non je ne t'en veux pas mon fils. Je pense que ton frère et toi avez fait votre devoir, ou du moins ce que vous pensiez être votre de devoir. J'ai toujours su que tu allais me revenir, et ton frère ne saurait tarder. »

Eudes se souvenait du jour de son départ pour la Ponantique. Sa mère n'avait montré aucune émotion particulière, comme à son habitude. Il lui avait été difficile de savoir si c'était par indifférence ou pour cacher sa tristesse. Constance n'avait jamais été une mère très expressive, d'autant plus après la mort d'Hugonet. Hugues avait toujours été le fils préféré, le prodige, l'héritier censé apporter le salut de la Cahogne. Eudes n'avait été qu'un pâle remplaçant, un suppléant par défaut. Sa mère lui en voulait-il ?
Encore aujourd'hui, et même suite à son retour après 5 ans d'absence, Constance restait la même femme froide et inaccessible. On pouvait difficilement reprocher à Eudes son manque d'affection pour sa mère, comment donner de l'amour à quelqu'un qui n'en montre aucun ?

« Est ce pour cela que j'ai vu partir Jeanne l'air fâché ? »
Contenu sponsorisé
MessageSujet: Re: En attendant le sacre En attendant le sacre - Page 3 Icon_minitime
En attendant le sacre
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut
Page 3 sur 4Aller à la page : Précédent  1, 2, 3, 4  Suivant

Sujets similaires

-
» Le Sacre
» Organisation du sacre

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Casus Belli :: RP :: Soulans, la capitale.-