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Eudes II de Cahogne
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeSam 7 Mar - 21:09
Je découvre Soulans sous un autre jour.
Lorsqu’on me l’expose, on la prépare. Lorsque je sors dehors, il y a le cérémoniel, le service d’ordre, les oripeaux ; On prépare mon entrée, et elle n’est jamais hasardeuse. Pour découvrir la vraie Soulans, pour véritablement explorer cette capitale si grandiose, on ne peut pas s’y promener avec une couronne sur la tête. Il faut y pénétrer grimé et discret.

Je me souviens que lorsque j’étais jeune, il m’arrivait de faire le zouave avec Raymond et Lothaire, alors que nous nous habillions en jeunes vauriens pour aller faire du charivari sous les fenêtres des maisons à colombages, harcelant les gros bourgeois, terminant nos nuits coursés par les sergents de nuit. Une fois, nous avions provoqué un grand embarras lorsque, cernés par les veilleurs à matraque, on avait dû annoncer tous les trois nos noms au chevalier du Guet. Jourdain m’avait giflé et mis au régime du pain et de l’eau pendant deux semaines en représailles à notre retour au Palais.
Comment ces gifles me manquent. C’était une période beaucoup plus simple. Une ère révolue. J’y songe avec un sourire nostalgique alors que je regarde par la fenêtre du petit carrosse dans lequel je suis. On est en train de traverser la Grenouillère, pas très loin de l’antique Sanctuaire où reposent mon père, mon frère et mes ancêtres. C’est un sale coin. Ça schlingue, y a des gens qui courent dans tous les sens, et malgré l’heure tardive, la lune bien haute dans le ciel, il y a encore foule qui rit et qui crie. En majorité des marins, et des étudiants qui doivent sécher les cours de demain. Quelques sergents de la garde communale patrouillent, en surveillant bien que les échoppes aient éteint leurs feux pour éviter l’incendie, mais ils sont rares et se font discrets : La sergenterie n’aime pas trop se balader du côté de la Grenouillère. C’est une poudrière, un lieu de vie, à la fois magnifique par son dynamisme et son cosmopolitisme, et dangereux pour le bourgeois qui aime l’ordre et l’autorité.
Catégorie dans laquelle j’entre, d’ailleurs.

« Quelle puanteur… Il faudrait paver les ruelles. »

C’est à Odilon le Chétif que je parle. C’est mon camarade qui me guide. Il est seul avec moi, enfin, excepté pour deux solides housecarles qui se sont vêtus de longs manteaux pour cacher leurs brigandines et leurs longs couteaux avec lesquels ils sont prêts à défendre ma vie : Harald et Baldur, deux Norges de Hisenmark, blonds, géants, épaules larges, gueules patibulaires et barbes fournies, j’ai l’air ridicule à leurs côtés lorsqu’ils m’escortent, et ils ne peuvent pas entrer dans une ruelle sans que les gens pivotent leurs têtes pour les dévisager.
Je me suis vêtu comme un marchand. C’est la couverture qu’Odilon a pensé bien trouvée pour moi. Du coup je me suis habillé d’un manteau un peu ample, d’une pèlerine sur le dos, et je garde une épée à ma ceinture, en abandonnant le joli fourreau décoré avec lequel je complète d'ordinaire mon harnois de chevalier. Sur ma tête, un chapeau à feutre qui ressemble à ceux que des hommes comme Lanfranc ou Daguerre peuvent utiliser. Je souris à Odilon, qui s’est fringué d’un style similaire au mien, passant pour mon intendant ou un comptable à mon service :

« Rassure-moi, je suis tout de même beau comme ça ? »

Ces derniers temps, le tutoiement s’est imposé entre nous. Personne d’autre à la cour depuis mon retour n’a obtenu ce privilège de ma part. J’espère que cette confiance nouvelle que je lui voue n’est pas mal placée ; Odilon est un garçon un peu bizarre, il tranche au milieu des grands clercs éduqués et des preux chevaliers racés par leur naissance. Il vient de ces ruelles sales et vivantes, Soulans, c’est chez lui, c’est là où bat son cœur. Mais il a réussi à se faufiler dans le Palais. Il n’y fait pas tâche, il y est transparent, dans le décor, et pourtant, il est tout l’inverse d’un intrus.

On arrête le carrosse dans une petite ruelle, et nous descendons. Le cocher sort une bouteille de vin, et commence à se mettre une murge alors qu’il devine qu’il devra nous attendre un long moment. Je me retrouve à plonger mes poulaines dans une sorte de gadoue, mélange de terre et de détritus, ce qui me fait légèrement grimacer.

« Les villes en Outremer étaient plus salubres. »

Malgré mon apparence de marchand, je ne peux pas m’empêcher de marcher comme un prince et duc. Menton relevé, épaules en arrière, main sur le manche de l’épée. Je me ballade comme si tout m’appartenait, ce qui tranche bien avec le pas débonnaire d’Odilon. Le long de notre marche, je vois quelques gamins en bande qui m’observent en me pointant du doigt. Nul doute qu’avec mon air arrogant, mon costume et ma trogne de garçon, je dois être une cible privilégiée pour ceux qui voudraient dévaliser un riche. Mais j’ai mes deux housecarles derrière, et leur énorme silhouette semble être suffisamment dissuasive.

On se dirige discrètement vers le Valet Noir. Tout le long, je croise le regard d’hommes plus âgés et plus solitaires, qui se tiennent sans raison devant des carrefours ou des allées, bras croisés, ou se reposant contre un mur. Ils me regardent fixement, et me suivent. Cela me met fort mal à l’aise.

« Qui sont donc ces crétins qui regardent les passants ? Ils n’ont rien de mieux à faire.
– Les hommes de Rigaud, répond Baldur avec son fort accent du Septentrion. Ne vous inquiétez pas, ils ne nous ferons pas de mal, au contraire ; Ce sont eux qui font la police ici.
– Eh bien, quelle bonne sergenterie, les locaux doivent être ravis.
– Oh, vous savez messire, les hommes de Rigaud savent peut-être mieux maintenir l’ordre que les sergents de Jacques Delphin ; Ils aiment que les choses soient calmes, le trouble ça fait fuir les affaires. Et Rigaud aime les affaires. »

C’est vrai que c’est quelque chose qu’on n’imagine pas quand on est à ma place. Mais c’est vrai – Rigaud peut se révéler un meilleur allié que ne le sont les véritables commerçants officiels. C’est même cela qui m’amène ; La Hanse est impliquée dans des trafics, il faut y mettre fin.
Et quoi de mieux qu’un truand pour pourchasser des truands ?

Le Valet Noir est une jolie auberge. Il y a foule en cette soirée ; De l’animation à l’intérieur. On entend de la musique, un groupe qui joue très fort. On pénètre à l’intérieur. Ça sent l’alcool, la sueur, et la promiscuité. Mes deux armoires à glace se collent quasiment à moi alors que je m’approche d’une des tables.

Selon Odilon, la nuit, Rigaud organise des combats avec un Cercle Privé dans les sous-sols du Valet Noir. Je le laisse s’éloigner tandis que moi et mes deux sbires allons trouver une table de libre, tout au fond de l’auberge, pour nous asseoir.
C’est pas pour me déplaire. Une jeune fille vient s’approcher de nous et nous demande ce qu’on veut boire ; Baldur me regarde, me demandant implicitement la permission de boire. Je nous commande chacun une choppe d’ale et profite de la musique.

On reste comme ça quelques instants, avec qu’Odilon ne réapparaisse avec des types louches. L’un d’eux a un œil crevé et des cheveux longs, l’autre est très pâle, au pantalon bouffant, avec tout l’air de ressembler à un Dremmen. Odilon me sourit et me fait signe que nous pouvons le suivre. Nous terminons tous trois nos verres et le suivons. On traverse l’auberge en longeant les murs, et on descend dans la réserve, où nous pouvons découvrir une petite trappe secrète. On se met à passer dans un escalier à colimaçon, très sombre, il faut que le borgne allume une torche pour nous éclairer.
Il y a pourtant bien de l’animation en bas. Des gens qui crient, sifflent et rient. On découvre alors, dans un sous-sol bien aménagé, avec des murets de pierre, des tables et des chaises confortables, une sorte d’arène construite avec des lices en bois. Deux gars sont en train de se tabasser, sous les sifflements et les cris de tout un tas d’habitués qui encouragent l’un ou l’autre, probablement selon leurs paris.
Et au-dessus de ça, Rigaud est en train de trôner. Comme s’il était le Duc des Ribauds, il est là, avec sa propre cour constituée de malfrats, cambrioleurs et truands, et ses soupirants, ses pétitionnaires. Il faut avouer qu’il singe ma superbe : Il a un magnifique doublet ouvert sur lui, et une jeune fille rousse sur les genoux qui joue avec sa barbe.
Nous nous approchons après que le borgne lui ait soufflé quelque chose dans l’oreille, probablement pour m’annoncer. Je me permet d’approcher de Dents-Blanches et le salue d’un signe de tête.

« Maître Rigaud, bonne soirée à vous. Je me nomme Maître Corvus, on a dû annoncer mon arrivée... »
Armarius
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeMar 10 Mar - 15:58
Sans un regard pour le duc déguisé, le prince des Ribauds leva une main pour le faire taire. Le chef de la pègre s'adonnait à sa passion et il ne fallait pas le déranger.
Les deux gorilles au centre de l'arène s'affrontaient férocement, abattant leurs poings comme des masses sur leurs visages déformés par les coups. Autour d'eux la foule délirait à la moindre goûte de sang qui les éclaboussait.
Le duc avait pénétrait dans une autre Soulans, secrète et sombre. Ces combats étaient un blasphème envers le Tricéphale. On s'adonnait à une ordalie en tentant Dieu, les gens pariaient de l'argent sur la décision divine et se délectaient de la violence entre fidèles triaphysites, tout ce que condamnait l'Eglise avec fermeté. Cet endroit puait l'hérésie.
Finalement, l'un des gorilles s'effondra au sol, le visage ensanglanté, la lèvre fendue, les arcades fêlées, le nez brisé et ses pommettes gonflées. L'autre n'était pas dans un meilleur état, mais il était debout. Dans la foule certains criaient de joie, d'autres affichaient leur déception.
Rigaud sourit, révélant la dentition qui lui donnait son surnom : ses dents étaient toutes cariées, jaunes et disloquées. Il repoussa la femme de ses genoux, se leva et applaudit les deux combattants.
Puis il fit signe à l'un de ses hommes, le borgne aux cheveux longs, et lui glissa quelques mots, avant de partir.
Le sbire de Dents-Blanches vint voir Odilon et Eudes et leur dit de le suivre dans une autre pièce.
Ils arrivèrent dans un bureau à l'écart de la cohue des combats clandestins. Là aussi le prince des Ribauds singeait le duc, son bureau ressemblait à celui du palais. Mais là où celui du duc surplombait la ville au sommet du rocher du Lion, celui du chef de la pègre était souterrain. La symbolique ne pouvait pas être plus forte, c'était une rencontre en enfer entre Dieu et le Diable.
Rigaud était déjà assis derrière son bureau et fit signe à ses invités de faire de même.
Avec les deux sbires de Dents-Blanches dans leur dos, l'atmosphère était tendue. Eudes n'avait ni son armure ni sa garde personnelle, il était comme nu devant le véritable souverain des bas-fonds de Soulans. On pouvait déjà s'imaginer le pire, voir une lame froide glisser sur la gorge du duc.
Mais le duc était la clef du pouvoir de Rigaud.

« Excusez moi monseigneur pour mon impolitesse, mais je ne pouvais pas vous accueillir comme un prince au risque de griller votre couverture. »

Cela se ressentait que Rigaud faisait des efforts pour parler comme un aristocrate de la cour, mais il ne trompait personne. Il avait toute l'apparence du fils de putain ayant grandit dans un bordel avant de devoir survivre par le vol et le meurtre. Pour cela, Rigaud était le meilleur, c'est ce qui lui valait aujourd'hui d'occuper le trône de la pègre.

« Odilon, cela faisait longtemps que l'on t'avait vu ici. Tu n'as donc pas totalement renié ta famille.
- Bonjour Rigaud, je resterais à jamais fidèle à ma famille de cœur, mais les affaires à la cour me retiennent et je n'ai plus autant l'occasion de venir vous voir. Mais nous ne sommes pas venu pour parler de ça, mettons de côté nos querelles pour servir le duché.
- Oui, je sais, vous êtes là pour le médecin. Nous l'avons fait suivre jusqu'à l'Antre de la Vipère en compagnie de l'intendant de Picquy.
- Nous savons déjà cela.
- D'après nos informateurs, la Hanse serait en lien avec Lanfranc de Picquy pour faire sortir des cargaison de vin de Cahogne sans passer par les péages ducaux. Népotain n'est qu'un intermédiaire qui représente son frère, le Grand-Consul. Pour leurs méfaits, ils utiliseraient le réseau de contrebande de la Vipère. Ce serait l'occasion de le faire tomber lui aussi.
- Ou alors nous pourrions le convaincre de témoigner contre Népotain et de nous aider à le faire chuter ?
 »

La rivalité entre Rigaud Dents-Blanches et la Vipère était connue. Les deux barons de la pègre locale s'affrontaiznt pour le contrôle des quartiers de Soulans. Si Rigaud dominait dans Nord de la Grenouillère, la Vipère régnait sur le Sud.
Depuis qu'ils servaient tous deux le duc, ils étaient en trêve. Mais l'un et l'autre complotaient toujours pour se faire tomber. Naturellement, Rigaud voyait là l'occasion rêvée pour abattre son adversaire et devenir le seul souverain des bas-fonds de Soulans.

« La Vipère représente une menace pour votre règne monseigneur. Avec quelques preuves, des témoins clefs nous pourrions faire tomber tout son réseau, de Picquy et Népotain avec.
- Mais la Vipère est aussi un fidèle serviteur de la couronne.
- Cela ne m'étonne pas que tu le défendes Odilon, tu as toujours été un traître à ta famille, prêt à t'acoquiner avec l'ennemi pour t'élever toujours un peu plus.
- Ma famille c'est toute la Cahogne désormais. Nous ne sommes pas là pour servir tes petits intérêts Rigaud, mais ceux du duc.
 »
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeMar 10 Mar - 23:26
À peine dans le bureau de Rigaud, qu’Odilon et le chef de la pègre se répandent en conflits. Je ne suis pas vraiment à ma place ici, ma majesté de duc a bien moins d’effets. Un instant, un petit silence tient après que Dent-Blanches m’aie exposé la situation. Je hausse les épaules lorsqu’ils attendent une réponse :

« N’avez-vous pas quelque chose à boire ici ? Ce sera plus agréable pour discuter, je pense. »

Je me détend sur le siège où Rigaud m’a invité à m’asseoir. Je tourne la tête vers Odilon et lui fait un signe, cherchant peut-être quelque chose dans son regard, un conseil qu’il n’aurait pas à dire à voix haute.

« Je doute que le témoignage de la Vipère ait beaucoup de poids au Parlement. Il est vrai que sa coopération serait utile, mais s’il aide la Hanse à faire de la contrebande, alors il est du mauvais côté de l’échiquier. Je pourrais même penser qu’il est mon ennemi. »

Nul doute que la Vipère fait ça depuis les temps de mon père. Mais il est temps que les gens dans cette ville comprennent qu’il y a un nouveau Duc au pouvoir, à présent. Beaucoup de choses vont changer.

« La prostitution, les combats de rue, toutes les choses illégales sur lesquelles le duché ne touchera pas le moindre denier, c’est une chose. Mais le vin j’ai un dû dessus. Je trouve que la contrebande de vin est un acte bien plus répréhensible que le proxénétisme, personnellement.
Maître Rigaud, j’ai besoin que nous coopérions ensemble. Directement. Pas à travers l’œil d’Espien. Si vous aviez un arrangement avec lui, je suis prêt à le renégocier pour avoir votre soutien. Qu’avez-vous à me dire ? »
Armarius
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeMer 11 Mar - 20:53
Dès que le duc se plaignit de son gosier sec, Rigaud claqua des doigts en direction d'un de ses hommes de main. Rapidement, le sbire borgne à la gueule patibulaire se transforma en valet, apportant une bouteille de Mauriac, cette eau-de-vie de vin très populaire chez les coupe-jarrets qui ne pouvaient se contenter du vin couper à l'eau pour se donner du courage.
Rigaud attrapa la bouteille pour l'observer, puis il la tendit à son homme de main.

« Tu te fiches de moi ? Nous avons mieux que ça. Sert notre meilleur bouteille, c'est le duc que nous avons à table, pas un vulgaire forain ! »

L'homme reparti avec la bouteille puis s'en revint avec une meilleur, toujours du Mauriac mais d'un autre age et d'une toute autre qualité. Rigaud lui fit signe de servir trois verres.

« Il est vrai que je vois mal le Parlement écouter un contrebandier, bien qu'officieusement il serve le duché, reprit Odilon, mais la Vipère pourrait nous conduire à des témoins et nous apporter des preuves formelles contre Népotain et Lanfranc.
- Il est votre ennemi assurément !
renchérit Rigaud pour aller dans son sens. La Vipère ne sert pas le duché, il en profite.
- Et quelle différence avec toi ?
répondit Odilon en souriant,
- Je suis un collaborateur du duc, j'assure la sécurité de Soulans et en échange je me rétribue sur certains échanges en ville.
- Certains "échanges" ? C'est comme ça que tu appelles les trafics et la prostitution ?
 »

Rigaud fit la moue, puis se tourna vers Eudes. Le duc était un meilleur interlocuteur, il comprenait la situation et le danger que pouvait représenter la Vipère.

« Vous voyez monseigneur, je suis un associé de la couronne, je régule les trafics qui pourraient vous gêner, je ne détourne pas vos deniers. L'évêque l'avait bien comprit lorsqu'il est venu me chercher. Après la grande révolte, il fallait quelqu'un avec des couilles pour assurer la sécurité dans la ville. »

A l'évocation de la révolte de Soulans, Odilon changea d'expression un instant avant de se reprendre.

« Je suis devenu une sorte de contre pouvoir officieux au prévôt. En échange, l'évêque ferme les yeux sur mes activités -ceux de l'Eglise surtout- me laisse me rétribuer par un impôt sur les marchands et m'offre sa protection et me préserve de la garde du prévôt. Ce Jacques Delphin, depuis qu'il a prit la prévôté il s'intéresse d'un peu trop prêt aux trafics dans la ville.
Mais l'évêque est un pingre, il s'est montré avare sur ma rétribution. Si vous voulez renégocier l'arrangement que j'ai avec le duché, peut être que nous pourrions envisager une augmentation de ma taxe de sécurité sur les boutiques de la Grenouillère, ainsi qu'une extension de ma "juridiction", surtout s'il l'on évince la Vipère du jeu.
 »
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeMer 11 Mar - 23:03
Odilon ne semble vraiment pas apprécier Rigaud. Il semblerait qu’il y ait un vrai passif entre les deux hommes, un mélange de respect et d’inimité J’avais demandé, le jour de mon sacre, à ce qu’Odilon ne se confie pas trop ; J’ai envie qu’il me dise ses secrets lorsqu’il jugera bon de me les confier. Lorsqu’il jugera que lui et moi sommes amis.
En attendant, je me retrouve face à un Rigaud très insistant quant à l’idée de se débarrasser de la Vipère. Odilon semble moins franc à l’idée de lui accorder autant de pouvoir.

« Cela m’a eut l’air d’être un sacré bordel, cette révolte. Je n’étais pas présent, et pourtant j’ai l’impression que la ville et le duché payent encore tout ce qui s’y est déroulé…
Qu’est-ce qui s’est donc passé pour qu’on atteigne un tel niveau de merde ? Qu’est-ce qui a provoqué la révolte au tout début ? »
Armarius
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeMar 17 Mar - 23:56
Le prince des Ribauds sortie une petite dague de sa manche, presque aussi fine qu'une aiguille, et la planta dans une tranche de saucisson qu'on venait de poser devant lui. Il l'avala avant de répondre.

« Oui, c'était il y a 3 ans déjà, une véritable catastrophe.
- Pas pour tout le monde,
répondit Odilon, je crois savoir que c'est cette révolte qui t'a permis d'atteindre la place que tu occupes aujourd'hui.
- J'étais là au bon moment, et j'ai permis au duc de ramener le calme dans la ville.
C'est une histoire d'argent qui a tout commencé, comme souvent. Le duc a demandé une augmentation de la capitation pour financer ses guerres, le Parlement l'a voté contre l'avis du peuple qui s'est retrouvé grévé sous de nouveaux impôts. Un jour au marché, des soldats ducaux ont commencé à confisqué les marchandises de ceux qui ne pouvaient payer les taxes. Ce fût la goutte d'eau, la ville s'embrasa d'un coup et le duc répliqua par plus de soldats. Le peuple se mit à barricader les rues. Il s'est emparé des portes de la ville et a enfermé le duc dans son propre palais. La situation dura 3 mois, jusqu'à ce que le connétable Mauger Tancarvelles ne viennent libérer votre père avec les culottes rouges. Une nuit, l'un des insurgés trahit ses compagnons et ouvrit une porte à l'armée ducale. Se fût un massacre pendant 3 jours...
 »

Odilon semblait mal à l'aise au récit de Rigaud. Le caïd frappa la table de son poing pour couper court au blanc qui s'installait, ce qui fit sursauter le chambellan.

« Mais tout ça c'est du passé monseigneur ! Ne ressassons pas les vieilles querelles. »
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeMer 18 Mar - 14:08
Quel étrange personnage que ce Rigaud. J’écoute attentivement son discours, en fronçant les sourcils. Quelle sale situation. Il frappe la table comme un dérangé, ce qui me fait avoir un petit sursaut.

« Oui… Quelle sale situation, tout de même. »

J’ignore pourquoi Odilon fait une telle tête à ces souvenirs. Il a grandit à Soulans, il a dû vivre ces mois de siège aux premières loges. Il faudra que je lui en parle, plus tard.

« Augmenter votre part en échange de la protection de la Grenouillère me semble tout à fait juste. Dites-moi quel prix vous souhaitez pour répondre à moi plutôt qu'à Espien.
Quant à la Vipère… Il s’est montré irresponsable de provoquer de la contrebande dans mon dos. J’irai parler avec lui, m’assurer qu’il soit fidèle à ma personne. S’il décide de travailler contre mes intérêts, et qu’il ne m’aide pas à appréhender Népotain et son frère, il ne sera que justice que vous preniez son quartier.
Les trafics et la prostitution, je m’en fiche. Je ne m’opposerai jamais à ces commerces illicites. Mais la contrebande, c’est s’attaquer à mes profits à moi, et détourner mon propre produit. »

Je me tourne vers Odilon.

« Où se trouve donc cette Vipère ? Et comment puis-je le forcer à se soumettre à mon autorité ? »
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeJeu 19 Mar - 12:13
Rigaud ouvrit grand ses bras tout en révélant de nouveau ses dents cariées.

« Parfait monseigneur ! J'aime quand les négociations aboutissent. La Vipère est un irresponsable en effet, j'espère que vous allez le châtier, c'est tout ce qu'il mérite pour les offenses contre vous.
Qu'on apporte donc une nouvelle bouteille de Mauriac ! La meilleur !
 »

Aux ordres de Rigaud Dents Blanches, le borgne retourna chercher une seconde bouteille pendant que son chef vidait la première dans les trois verres devant lui.

« La Vipère, répondit Odilon, se trouve dans une taverne qui lui sert de couverture dans le Sud de la Grenouillère, l'Aspic, mais qu'on l'appelle tous l'Antre de la Vipère. Je peux vous introduire à lui, la Vipère est censé être un allié de la couronne, il ne refusera pas de vous voir. »

La nouvelle bouteille apparue sur la table et Rigaud s'empressa de l'ouvrir. Lui avait déjà terminé son verre.

« Dite moi monseigneur, je n'ai pu m'empêcher de voir ces deux costauds qui vous accompagnaient. Ce sont vos fameux housecarles qui assurent votre sécurité personnelle ? Ils sont bien battis.
Que diriez vous d'en mesurer un à l'un de mes champions ? Ces gaillards feraient de parfait combattant dans mon arène. 
Nous pourrions parier sur le vainqueur.
»

Rigaud fronça des sourcils, observant de bas en haut le duc.

« Mais vous n'êtes pas mal non plus monseigneur, et la croisade nous a rapporté votre réputation de grand guerrier, peut être voudriez vous entrer vous-même dans l'arène ? »
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeJeu 19 Mar - 22:38
Rigaud semble pressé de me charger. Et sec. Bien malgré moi, il amène une nouvelle bouteille sur la table, alors que j’étais prêt à déjà me mettre en route pour aller rencontrer la Vipère.
C’est alors qu’il m’étonne par une proposition bien singulière. Me battre, en combat singulier ? Voilà quelque chose de fort étrange.

Je lui souris en ricanant un petit peu.

« Si je décidais d’entrer dans l’arène, il faudrait interdire à mon adversaire de me frapper au visage ; Il serait bien malencontreux de me présenter demain au Conseil avec un coquard ou une dent en moins. »

Il est vrai que je suis plutôt grand, et exercé à la lutte et à l’escrime. Mais j’ai pris l’habitude de ne jamais courir au devant du danger, de ne jamais me mettre trop en avant ; C’est ce qui m’a sauvé la vie, à la Croisade. Je n’ai jamais fait le moindre duel à mort, tout juste des passes d’armes courtoises et bien chevaleresques durant mon adolescence.
Les combats de chez Rigaud, ils sont d’un autre genre. Une toute autre espèce. Pour dire la vérité, je ne suis vraiment pas sûr d’être capable de tenir debout plus de trente secondes face à un gaillard bien plus costaud que moi.

« Je suis désolé de vous décevoir, mais je me dois de décliner pour moi-même.
En revanche, mes Housecarles… Il est vrai qu’ils cherchent toujours une raison de se bagarrer. Qu’est-ce que vous proposez de parier ? »
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeJeu 19 Mar - 22:50
« Bien entendu monseigneur, je comprends bien. Ce beau visage représente l’État, il ne faut pas l'amocher. »

Rigaud se garda bien d'insulter le duc de couard, peut être l'aurait-il fait avec une ou deux bouteilles de Mauriac en plus. Mais le duc n'était pas sot, il avait vu les brutes de l'arène, il n'était pas de taille à les affronter.
Rigaud se satisfit d'un housecarle. A l'idée du pari, il afficha un large sourire de rapace avide, dévoilant encore ses dents salement cariées, comme s'il en tirait une certaine fierté.

« Et bien nous pourrions parier de l'argent tout simplement. 100 livres ?
Ou bien si vous êtes joueur, nous pourrions parier notre accord : si je gagne, vous augmentez ma taxe de sécurité de 50%. Si je perds, je me conterai de 25%. Qu'en dite vous ?
»
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeJeu 19 Mar - 23:07
« Vous souhaitez que je remette une décision qui influencerait le sort de la cité tout entière, en ma qualité de Duc sacré par Dieu tout-puissant pour Le servir de lieutenant, à quelque chose d’aussi vil, bas et vulgaire qu’un combat dans un sous-sol d’une taverne mal famée ? »

Je regarde Rigaud tout droit dans les yeux, en fronçant les sourcils. Je laisse un petit silence planer.
Puis, je ricane.

« Très bien alors ! Même si je perd, ce sera un bon spectacle. »

Le Housecarle que je vais choisir va avoir du pain sur la planche. Je termine le verre de vin et échange quelques compliments avec Rigaud, avant de me lever pour aller retrouver mes Norges.

Ils sont donc deux : Harald et Baldur. Physiquement, ils se ressemblent pas mal. Ils ont cette allure de nordiques bien vigoureux, rendus grands et puissants par la difficile vie du Septentrion. Blonds, musclés, taillés par l’escalade et la course dans la toundra. Harald est plus ancien, plus vétéran, plus sérieux aussi. Baldur en revanche est une tête brûlée. Il est encore tout jeunot, et a une tête de beau garçon, sa longue barbe tressée en de multiples nattes. Il lui manque beaucoup de discipline, mais il frappe vite, fort, et en faisant des coups bas, là où Harald préfère retenir ses coups pour bien analyser la situation.
Vu le combat, c’est plutôt à Baldur je vais me remettre.

« Baldur, la Cahogne a besoin de toi ! »

Il se lève, bien étonné.

« Oui, messire ?
– Combien on te paye, d’ordinaire, pour un combat de rue ?
– Mh… Trente, quarante sols.
– Tu vas affronter l’une des brutes qui combat dans cette arène. Si tu perds, je te payerai cinq livres d’argent. Si tu gagnes, tu en auras trente ! »

Trente livres pour gagner un combat. Ça c’est pas une petite motivation. Il y a des gens de ma cour qui ne gagnent pas cela en un mois, lui il l’aura en une soirée. C’est trois mois de gages qui lui reviennent d’un coup. Si ça ne le convainc pas de se battre comme une furie, j’ignore ce qui fonctionnera.

« Et fait un beau spectacle, ton Duc en serait ravi ! »
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeVen 20 Mar - 11:25
« Fort bien !
Qu'on aille me chercher Ganbatu !
 »

Rigaud raccompagna Eudes et Odilon hors de son bureau pour retourner dans l'arène où continuaient à se battre deux combattants bien amochés.
Le prince des Ribauds retourna sur son estrade où il siégeait devant son peuple, leva les mains pour obtenir le calme, ce que la foule s'empressa de lui donner, puis dit :

« Messieurs Dames ! C'est un spectacle exceptionnel que vous allez voir ! La lutte entre deux races que Dieu a fait pour la guerre, d'un côté le Norge Baldur, descendant des terribles vikings, ravageurs de nos côtes, massacreurs d'enfants ! De l'autre, votre champion, Ganbatu le Kichique ! »

Au nom du champion de l'arène, la foule cria de joie. Puis apparu un colosse aux yeux bridés, mesurant près de deux mètres, aussi gras que musclé. Son visage rondouillé mais agressif lui donnait l'apparence d'un gros bébé tueur. Il portait une large cicatrice sur la joue droite et des cheveux tirés en arrière dans un chignon.

« Malheureusement, ce combat n'est pas ouvert aux paris, car ce jeu n'oppose que moi-même et Maître Corvus. »

Rigaud désigna Eudes qui restait incognito. Par chance il ne reconnu dans le public personne qui pouvait le connaître, il n'aurait pas été étonnant de voir un noble ou deux dans l'assistance, un Eustache n'aurait pas fait tâche ici à crier pour le vainqueur d'un combat.
Ganbatu approcha de son maître qui lui chuchota quelques mots à l'oreille :

« Surtout, retient un peu tes coups, je ne veux pas que notre invité soit trop humilié. Et n'oublie pas, ce n'est pas un combat à mort, alors ne sort pas cette dague de ta botte. D'accord ? »

Le gladiateur répondit par un signe de tête déterminé. Il comprenait le landique, mais ne le parlait qu'à peine. Puis Rigaud s'assit sur son trône et invita Eudes à faire de même à ses côtes, sur une chaise bien moins riche que la sienne. Ici le duc c'était Rigaud, Eudes n'était qu'un ambassadeur en pays étranger.

« Quel bel achat que j'ai fait. 2 000 livres que j'ai payé pour ce colosse. Il nous vient tout droit des montagnes du Tartrasse à l'Ouest de la Wisimanie, d'une tribu Kichique appelée les Turauques, la plus dangereuse de toute. C'est un marchand Valentin qui me l'a vendu.
Je ne vous ferais pas l'offense de vous dire qu'il n'a jamais perdu un combat.
 »

La confiance de Rigaud en son champion avait de quoi irriter.
Baldur et Ganbatu rentrèrent dans l'arène et se firent face. Ce dernier dépassait le Norge d'une tête qui paraissait presque frêle à côté du Kichique.
Rigaud Dents-Blanches fit un signe pour débuter le combat et la foule se mit à crier. La plupart était pour le Kichique, certains de sa victoire pour l'avoir déjà vu combattre plusieurs fois.
Baldur commença par tourner autour de son adversaire, puis il frappa vite et fort comme il savait le faire. Son poings rencontra la masse graisseuse du Kichique qui ne bougea qu'à peine. Avec un tel coup, la plupart des adversaires du huscarl se retrouvaient par terre. Ganbatu, force de la nature, se contenta de sourire. Puis il attrapa la barbe du Norge et la tira. Baldur roula par terre.
La barbe pour un Norge c'était sacré, la tirer en combat était une injure. Baldur se releva, furieux.
Rigaud trépignait sur son trône, sachant la victoire déjà acquise. C'était presque triché que d'avoir un champion comme Ganbatu.
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeVen 20 Mar - 17:09
Mon petit sourire satisfait s’est vite estompé en voyant que la vive attaque de Baldur ne fit même pas trembler son adversaire. Mes Housecarles sont des forces de la nature, ils terrifient le quidam, et font forte impression sur tout le monde – moi compris. Je n’aurais pas cru qu’il y ait quiconque sur cette Terre qui puisse résister à l’assaut d’un Norge. Il semblerait bien que je me sois trompé.

Ça se bat. Ça se cogne. Baldur tente de nouveaux assauts, en rugissant, en hurlant dans sa langue. Je ne suis même plus sûr qu’il se bat pour faire son devoir ou pour les trente livres ; À l’instant même où on s’en est prit à sa magnifique barbe nattée, c’est devenu personnel. Mais ses assauts ne servent à rien. Le monstre face à lui se contente d’encaisser, de le laisser venir. Peut-être que les attaques lui font vraiment mal, mais si c’est le cas, il n’en montre rien. Baldur s’épuise contre lui, avec toute sa technique. Il affiche en fait tout ce qu’il sait faire à son adversaire, qui n’a plus qu’à attendre le bon moment pour lui attraper le crâne, et l’envoyer se gameler par terre, sous les rires et les sifflets des spectateurs.

De rage, et passablement ivre, je tape sur le dossier de mon fauteuil. Harald, derrière moi, bouge sa tête de gauche à droite, désapprobateur.

« C’est un géant c’truc, on bat pas un géant en lui fonçant dessus. »

Au milieu du combat, il y a une pause soudaine qui se dessine. Ganbatu retourne vers son côté pour aller se passer une serviette sur le front. Je bondis hors de mon siège, tandis que Rigaud applaudit son champion, et me rue vers l’arène pour aller voir Baldur qui s’effondre presque en haletant, reprenant difficilement son souffle.

« Eh bien alors, quel est le soucis ?
– Un peu… Plus costaud que j’pensais, messire... »

Ganbatu roule des mécaniques derrière, tandis que d’autres spectateurs rient aux éclats.

« N’essaye pas de le combattre de front, t’y arriveras jamais avec ce géant. Il est lourd, toi t’es rapide.
Tourne son flanc et frappe ses reins. Ses reins, t’entends Baldur ? Personne résiste à ça, ça va le paralyser et te donner l’occasion de le faire souffrir. »


Il agite la tête de bas en haut. Je dois avoir l’air fin d’apprendre à un type qui fait que se battre depuis qu’il est gosse comment on fait de la lutte. Peut-être parce que je suis son patron, il ose pas m’engueuler et se contente de se taire.

« C’est qu’une grosse brute, il a rien dans son crâne, mais il est bien ferré son crâne ; Les reins, t’entends ? Vas-y mon grand ! »

Je lui donne une grosse tape sur ses épaules musclées et applaudit en sifflant moi aussi.
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeVen 20 Mar - 18:14
Eudes vint se rasseoir à côté du prince des Ribauds qui ne cachait pas sa satisfaction.

« C'est donc ça qui assure votre sécurité monseigneur ? Votre homme sa bat bien, mais peut être devriez-vous engager une garde Kichique. »

Rigaud ria. Ici il se sentait tout puissant, chez lui, dans son royaume, il pouvait se permettre de toiser le duc de Cahogne. Mais il y avait des limites, il voulait impressionner le duc, pas l'insulter.

« Excusez-moi monseigneur, j'aurais dû vous présenter mon champion avant de vous proposer ce pari, peut être n'auriez-vous pas accepté. J'espère que je ne vous donne pas l'impression de vous avoir trompé, ce n'était nullement mon attention.
Mais nous trouvons toujours plus fort que nous. Les Norges font de fiers athlètes mais les Kichiques sont au dessus. Qui sait, peut être bien qu'en extrême occident se trouvent d'autres races qui surpassent les Kichiques ?
 »

Le combat reprit. Baldur se remit de sa déculotté du premier round, surprit d'avoir trouvé un adversaire d'une telle force. Il semblait galvanisé par les mots de son patron, ou bien peut être avait-il été vexé par les conseils d'un jeune Cahon, duc fut-il.
Le Norge commença à frapper de face, répétant les mêmes erreurs, mais c'était une feinte car cette fois, lorsque Ganbatu riposta, il fit un rapide pas de côté pour esquiver et lança son poing dans le flanc droit du Kichique. Celui-ci ne réagit pas, mais il avait perdu son sourire narquois qu'il affichait jusque là. Peut être le coup avait-il fait mouche ? Baldur recommença la tactique conseillait par le duc, jusqu'à soutirer à Ganbatu un petit cri de douleur.
Le visage de Rigaud se figea, inquiet pour son champion (ou plutôt pour son pari).

« Mais qu'est ce que vous lui avez dit à votre homme ? »

Rigaud se leva, frappa dans ses mains pour encourager son champion.
Eudes avait raison, le Kichique n'avait rien dans le crâne. Certainement qu'il ne devait son titre de champion qu'à sa taille et son poids, Gunbatu était une force brute mais il n'avait aucune technique. Baldur continua de lui tourner autour, à éviter ses coups trop lents pour le toucher et à frapper dans ses reins. Gunbatu s'épuisa, son front perlé de sueur, il souffla. Un dernier coup du Norge lui fit mettre un genou à terre dans une étrange grimace. Le Kichique leva une main pour s'avouer vaincu.
La foule était sidérée. Rigaud encore plus.

« Incroyable. Je retire ce que j'ai dit monseigneur, vos housecarles sont exceptionnels. Jamais je n'avais vu Gunbatu plier devant un adversaire.
Combien voulez-vous pour Baldur ? Je veux en faire mon nouveau champion !
 »
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeVen 20 Mar - 21:13

Mon Baldur se bat merveilleusement bien. Il charge, frappe adroitement. Il justifie bien assez ses gages. J’exulte sur mon siège, frappe plusieurs fois le dossier en ricanant. Le rapport des forces s’est tout à fait inversé. À la fin du combat, alors que la majorité des spectateurs sont devenus silencieux, je me met à applaudir vivement :

« Bravo ! Quelle audace, mon grand ! »

J’ai misé l’avenir de Soulans sur un combat. Je fais un Duc atroce. Et pourtant, je viens de gagner une véritable victoire diplomatique, plus franche que tout ce que j’ai jamais eu à obtenir depuis mon retour des Croisades. Je devrais vraiment trancher plus de questions ainsi.

« Je suis désolé maître Rigaud, mais Baldur n’est pas à vendre ; Il assure ma protection, et vu le nombre de personnes qui doivent vouloir ma tête, vous admettrez qu’il n’est pas une petite précaution ! »

Je le regarde droit dans les yeux. Avec un grand sourire en coin.

« Vingt-cinq pourcent de plus. À présent vous travaillez pour moi, et plus pour Espien.
J’ose espérer que ceci est le début d’une relation très productive entre nous deux. »


Je me tourne vers Odilon, que je fais venir en lui faisant un geste du doigt.

« Il faut que tu m’arranges un rendez-vous avec la Vipère, à présent. »
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeSam 21 Mar - 14:02
« Je comprends monseigneur, lorsque l'on a un homme tel que votre Baldur sous la main, il faut le garder.
Je serais désormais votre homme-lige et me contenterait de 25% supplémentaire. Si on aime jouer il faut savoir perdre, sinon le jeu n'a aucun intérêt.
 »

Baldur avait peut être gagné mais il avait été salement amoché par les grosses tartes du Kichiques. Une lèvre fendue, une arcade éclatée et le nez légèrement dévié sur un côté, il avait dégusté pour l'honneur de sa barbe.
Rigaud Dents-Blanches salua Eudes, puis le duc quitta le Valet Noir avec Odilon et ses deux housecarls, repassant l'escalier en colimaçon jusqu'à la trappe secrète, guidé par la torche du borgne. Nous étions désormais au milieu de la nuit, mais la taverne était toujours bondée de monde, de marins, d'ouvriers, d'étudiants, de mercenaires et de prostituées. Toute la lie de Soulans semblait se réunir dans la Grenouillère lorsque le soleil disparaissait.
Eudes se dirigea vers le petit carrosse qui l'avait amené ici, mais Odilon l'arrêta.

« Monseigneur, le carrosse sera inutile là où on va, les rues menant à l'Antre de la Vipère sont trop étroites par qu'il passe. Il faudra y aller à pieds. Faite attention à votre bourse et que vos gardes nous suivent de près, les rues de Soulans la nuit peuvent être dangereuses. »

Si Eudes s'était mit à tutoyer son chambellan, Odilon n'osait pas encore le faire. Après tout, il n'était qu'un valet, un roturier, et Eudes était son suzerain, son patron, le duc de Cahogne. Jamais il ne s'était permit de parler avec familiarité avec son prédécesseur, le duc Hugues, cela aurait été lui manquer de respect. Bien que de 10 ans son aîné, Odilon comptait bien avoir le même respect pour le nouveau duc.

« Il faut aussi que je vous mette en garde contre la Vipère. Des rumeurs courent sur lui, c'est un être mystérieux, voir mystique. Son nom est évidemment un pseudonyme, on ignore sa véritable identité, d'où il vient, qui il est réellement. On raconte qu'il serait immortel et pourrait voir à travers les murs, qu'il serait capable d'être à plusieurs endroits en même temps.
Il n'est pas seulement le maître de la contrebande, mais il est aussi à la tête d'un réseau de voleurs, d'espions et d'informateurs qui le vénèrent presque comme le guide d'une secte...
 »

Après avoir descendu vers la grand rue puis dépassé les terrains vagues en passant devant le Chenil, fameux bordel de Soulans, ils entrèrent sur le territoire de la Vipère au Sud de la Grenouillère. L'endroit semblait ne pas avoir changé depuis la jeunesse de Eudes comme si le temps n'avait pas d'effet ici. C'était les mêmes maisons branlantes, les mêmes chemins boueux et sales.
Ici l'ambiance était plus calme, loin des tavernes et des bordels du Nord. Mais il y avait toujours des gens pour traîner dans les rues.

A un carrefour entre deux ruelles étroites, un jeune garçon déboula à toute vitesse et fonça sur Eudes pour le bousculer. Il balbutia quelques excuses sincères puis disparu dans l'obscurité. Fuyait-il quelque chose pour être aussi pressé ?

« Je vous avez dit de faire attention à votre bourse monseigneur. »

Effectivement, manquait à la ceinture de Eudes sa bourse de cuire qui contenait quelques pièces d'argent à l'effigie de son père. Il devait bien y avoir 10 livres là dedans, la fortune du jeune voleur était faite.

« Ne vous inquiétez pas monseigneur, je sais où il va, continuons notre chemin. »

Odilon n'avait pas l'air inquiet à sillonner dans ces coupes-gorges au milieu de la nuit. Il avait l'air d'être dans son élément. Après tout, c'est ici qu'il avait grandit. Peut être qu'à jouer aux vauriens avec Raymond et Lothaire lorsqu'il n'était qu'un adolescent pré-pubère, Eudes avait-il déjà croisé son futur chambellan.
Ils arrivèrent enfin devant l'Antre de la Vipère, mais la taverne semblait fermée. Il n'y avait pas un chat, pas une lumière. Odilon montra son étonnement, puis une voix s'éleva dans leurs dos.

« Vous cherchez quelque chose messeigneurs ? Quelque chose que vous avez perdu ? »

Un homme sortit de l'ombre, portant un riche costume avec un chaperon vert lui enserrant la tête et une cape. Il avait dans sa main un denier d'argent qu'il tenait devant lui, comparant le portrait de Hugues III dessiné dessus avec le visage de Eudes.

« Oui, vous lui ressemblez un peu. »

Puis l'homme remit la pièce dans une bourse et la jeta à Eudes. C'était celle du duc.
A ce moment, sortit derrière l'homme le jeune voleur qui avait bousculé sa seigneurie quelques instants avant.

« Qui d'autre que le duc de Cahogne pour se balader avec une bourse remplit de pièces dans les rues malfamées de Soulans ? Je suis heureux de vous rencontrer sire Eudes. Que me vaut cet honneur ? »

C'était la Vipère.
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeSam 21 Mar - 22:35
Soulans la nuit prend une drôle d’allure. Elle est un lieu de vie, sans les convenances et les us qui régissent chaque instant passé à ma cour. Lorsque je porte ma couronne ducale, je terrifie un peu les gens, ils font attention aux mots qu’ils utilisent en ma présence ; je ne suis plus tout à fait un homme. Ici, avec ma tenue de bourgeois, les choses changent. J’ai certes la présence de deux gros bras pour m’épauler et me garder du danger, même si l’un d’eux est endommagé, n’arrête pas de renifler et se plaint, sous les rires de Harald, d’avoir une oreille qui sonne. Mais enfin, c’est un tout autre décor.
Nous rencontrons beaucoup de gens. Des filles jeunes et moins jeunes, peu vêtues, qui me lancent des regards enjôleurs et quelques compliments afin de venir m’attirer à elles. L’une d’elle me propose de réchauffer mon lit, une autre me dit que je suis mignon. Elles en ont sûrement plus après la bourse qu’Odilon me demande de surveiller que ma trogne.
Nous tombons aussi sur des hommes. Grossiers, pieds-nus et en chemises, qui ricanent et hurlent sous les toits. Bronzés, tatoués, aux mains couvertes de blessures ; Des marins qui se détendent après un long moment passé en mer. L’un d’eux nous alpague. On me siffle. On me demande si je suis perdu, et on me propose avec un air clairement sarcastique si on peut m’aider. Ils cherchent la bagarre, peut-être moins avec moi qu’avec mes deux Norges qui leur jettent des regards en coin afin de les surveiller d’un œil alerte.

Odilon me met en garde face au truand que nous allons voir ; Il ne souhaite probablement que je prenne cette personne pour un simple malfrat aisé à pendre selon mon bon vouloir. Ici, je ne suis vraiment pas dans mon élément. Je m’en remet aux conseils du chambellan.

« Je ferai attention aux mots que j’utiliserai avec la Vipère, alors. »

Le calme arrive alors que nous nous enfonçons plus loin dans la grenouillère. Mes poulaines neuves prennent la boue, ce qui m’ennuie passablement.

« Tu vas un peu mieux, Baldur ? »

Le blond a pas l’air dans son assiette.

« J’gère, m’sire.

– C’était un sacré combat. Tu as bien servi la Cahogne aujourd’hui. Si seulement je pouvais régler tous mes ennuis avec mes Housecarles, la vie de Duc serait plus simple. »

Harald ricane.

« Ça f’ra une belle histoire à raconter au pays, tiens. Même si c’est pas une que vous voudrez raconter en Cahogne.
– Non, j’imagine pas ce que les États Généraux diraient s’ils savaient comment je gère la pègre.
C’est que tu commences à être âgé, Harald. Toi, quand est-ce que tu rentres au Septentrion ?

– Dites tout d’suite que j’suis vieux, messire !
Ouais, j’ai accumulé un bon pécule en servant vot’ père. Mais c’pas encore le moment pour moi d’prendre ma retraite. Après votre guerre dans le Vaujour, pourquoi pas. J’ai quelques affaires à terminer là-bas.

– C’est pas une affaire personnelle le Vaujour.
– Pour vous et les chevaliers, nan. Mais nous on y a perdu des gars. J’ai quelques Norges à venger, vous comprenez. »

Non je ne comprend pas trop, mais je feins d’approuver.
On passe dans une ruelle et un gamin me bouscule. Je serre des dents alors que je résiste à l’envie de le rouspéter ou de lui faire peur en le menaçant. Mais bon, ce n’est qu’un gamin, je ne suis pas cruel à ce point.

« Oui, dégage donc ! »

Alors même que le gamin m’a déjà tourné le dos et prit la poudre d’escampette, Odilon me dit qu’il m’avait prévenu. J’écarquille les yeux et suit soudain prit de panique quand je me rends compte comment le garçon a eut des doigts merveilleux. Je ne me suis même pas rendu compte de ce qu’il m’a subtilisé, je n’ai même pas senti la différence de poids à ma ceinture – alors même que j’ai une jolie somme devant.
Harald a l’air gêné.

« Eh bien… Ma faute. »

C’est pas donné à tous les hommes sur Terre de réagir à la perte de dix livres d’argent avec une telle philosophie. Je suis né privilégié, c’est ainsi que Dieu l’a voulu dans ses étranges desseins. Je me contente de continuer mon chemin en haussant les épaules, sans mauvais esprit. De toutes façons, Odilon dit qu’il sait où nous pouvons le retrouver.

Traîner dans des coupes-gorges la nuit n’est vraiment pas conseillé à quiconque, surtout à un beau bourgeois qui porte un manteau comme moi. Même lorsque je faisais le salaud avec Lothaire et Raymond, on prenait nos précautions ; Les malfrats n’auraient pas hésiter à nous tabasser, voire nous égorger, en ignorant nos identités à tous les trois. Un drame qui aurait été bien malencontreux. Mais voilà, Odilon lui marche d’un pas sûr, c’est assez fascinant. Un chambellan, on l’imagine pas dans la fange et les bas-fonds. On l’imagine maître des usages, gardien des révérences et des coutumes. Cela me fait rire.

« Je n’aurais jamais soupçonné que tu serais aussi à l’aise ici si tu ne m’avais pas avoué avoir grandit ici… Tu es vraiment une personne fascinante. »

On se retrouve devant la taverne. Fermée. J’en reste circonspect. Lorsque j’entends une voix derrière moi, soudain, je me fige. Je me tourne vivement, en portant une main dans mon mantel afin de tirer un coutelas que je garde sur moi pour ma protection, dans un pur réflexe instinctif et entraîné de chevalier. Mais non, c’est la Vipère. Je lâche mon acier tandis que lui-même me lance à nouveau la bourse.
Le petit gamin se tient à ses côtés. J’ouvre ma bourse et en tire une magnifique pièce argentée. Je fais un signe au garçon, puis fait voler la pièce en la jetant avec deux doigts pour qu’il la récupère à la volée.

« Tiens, pour ton art, jeune homme. »

Je vous l’ai dis, pas de mauvais esprit.

Je salue la Vipère d’un petit hochement de tête.

« Je suis venu pour, disons… Obtenir votre hommage. Comme j’ai fais avec mes barons et chevaliers.
J’ai besoin que nous précisions mieux les relations qui nouent le Duché avec votre personne. Mais je n’aime pas faire ça dans la rue. Peut-être que nous pourrions nous installer confortablement ? »
Armarius
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeSam 21 Mar - 23:14
Le gamin attrapa la pièce et l'observa comme un véritable trésor. A la lueur de la pleine lune elle brillait d'un bel éclat.
La Vipère observa autour de lui avec un sourire amusé.

« Il est vrai que les rues ne sont pas très sûres à cette heure de la nuit.
Entrez et faite comme chez vous, après tout, tout ceci vous appartient sire.
 »

Le quartier général des voleurs de Soulans ne s'était pas toujours trouvé là. Souvent "l'Antre de la Vipère" changeait d'endroit afin de brouiller les pistes. En ce moment, il était dissimulé sous le simple aspect d'une taverne appelée l'Aspic, rénovée par la guilde. Tout avait l'apparence d'un bouge, avec ses bancs, ses chaises, son bar. Mais l'alcool qu'on servait ici n'avait pas vu la moindre taxe ducale ; et pourtant on le payait le même prix qu'ailleurs.

« Pourquoi êtes vous fermé ce soir ? demanda Odilon, je pensais l'Aspic ouvert chaque soir.
- Disons que le tenancier est "absent". Et je n'ai pas eu le temps de lui trouver de remplaçant. Et je ne suis pas habile pour vendre le vin.
 »

Seulement pour le voler, aurait-on pu rajouter.
La Vipère parlait avec un accent Landais, d'une manière qui rappelait clairement la noblesse. Charles d'Annequin avait le même. Même ses gestes, élégants et maniérés, trahissaient ses origines. Il n'avait rien du simple coupe-jarret.
Eudes pouvait voir qu'à sa ceinture pendait une belle dague sculptée à la manière des armes que se transmettaient les familles nobles.  
Le duc suivit la Vipère jusqu'à l'arrière boutique, dans son "bureau" où était entreposé tout une série de tonneaux de vin certainement issus de la contrebande. La pièce était faiblement éclairée par quelques torches.
La Vipère se tourna vers Eudes.

« Dois-je ployer genou et mettre mes mains dans les vôtres où pouvons nous passer directement au sujet de votre visite ? »
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeDim 22 Mar - 0:05
La Vipère est un homme tout aussi intriguant que l’était Rigaud. Depuis la sécurité de mon Palais, il aurait été aisé de ma part de prendre ces sbires pour de simples criminels qu’on peut remplacer d’un claquement de doigt. Mais ils sont en réalité des seigneurs qui règnent sur d’étranges seigneuries. Rigaud est le Prince des Ribauds, la Vipère est le Marquis des Voleurs. Il me faut presque traiter avec eux de la même manière que je traite avec un Annequin ou un Tancarvelles.

Mais si la dague à la ceinture de la Vipère me fascine, en même temps que ses manières, la présence de tonneaux de vins me met en rogne. Comme je l’ai dis à Rigaud, je ne serai pas le genre de Duc très volontariste dans la lutte contre la criminalité. J’ai déjà tellement de feux à éteindre, il est hors de question d’en commencer un nouveau dans la capitale. Mais la contrebande ? C’est là où se trouve ce qui m’empêche d’être le Duc puissant qu’on été mes ancêtres. Le vin est la richesse de la Cahogne. Nous avons tant de millésimes, tant de cépages uniques. On boit du rouge Cahon jusqu’en Valentine. Sa vente devrait faire de moi le plus heureux et le plus prospère des princes. Mais j’ai cessé d’en toucher les deniers qui me revenaient de droit.

« Vous pourriez vous mettre à genoux si cela était, de votre part, un véritable gage de votre fidélité. Mais je préfère les actes concrets plutôt que les symboliques.
Permettez que je m’asseye ? »


Je tire une chaise et me pose dessus, nonchalamment. Je lève mes jambes et les poses sur son bureau, tout en croisant mes bras.

« Votre relation avec Népotain et la Hanse, combien elle vous rapporte ? Plus que les gages qui sont censés vous revenir en échange de vos loyaux services, n’est-ce pas ? »
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeDim 22 Mar - 0:23
La marquis des voleurs afficha un large sourire. C'était un homme intelligent, il savait exactement pourquoi le duc de Cahogne était là : Népotain, la Hanse, Lanfranc de Picquy et la contrebande.

« Hélas, cela ne me rapporte pas autant qu'à vous.
Bien sûr, je ne parle pas d'argent. Le commerce que je fais avec la Hanse est d'ordre diplomatique. Cela vous assure son soutient, la Hanse est votre amie grâce à moi, et c'est l'un des gros bailleurs du duché.
 »

La Vipère fit calmement le tour de son bureau. Il n'était nullement impressionné par Eudes et son ton accusateur.

« Gouverner est plus compliqué que simplement drainer des deniers sire Eudes. Votre père avait bien comprit la subtilité du métier.
La contrebande vous apporte bien plus que vous ne pensez perdre. Cela permet de réguler la frustration du peuple qui croule sous les taxes. Achetez du vin moins cher leur évite de se soulever contre vous.
Surtout, mon réseau fait bien plus que de simplement passer des marchandises. Sur les routes les informations circulent autant que les marchands, le sire de Saint-Saëns l'a comprit et c'est pour cela que je collabore avec lui. Vous seriez curieux du nombres d'informations qu'on me rapporte du Valais par exemple.
 »
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeDim 22 Mar - 0:36

Je pouffe de rire en levant les yeux au plafond, tandis que ma tête suit son mouvement alors qu’il va s’asseoir au bureau. Je reste les bras bien croisés, comme un gamin bougon qui a décidé de faire la tête, et mon sourire est plus que narquois.

« C’est marrant, depuis que je suis rentré de Croisade, je n’ai jamais eu autant d’amis ; Partout où je vais, je ne suis qu’entouré de personnes qui sont prêtes à se jeter vers moi en répétant qu’elles ont toute l’amitié du monde pour moi et uniquement mon intérêt dans leur esprit.
Et pourtant malgré cela, le Duché croule toujours sous les dettes, est miné par la corruption, et est incapable de gagner ses guerres. »


La Vipère bosse pour Saint-Saëns. Comme Rigaud bossait pour Espien. Il est vraiment temps que je reprenne le contrôle de mon administration.

« Je ne souhaite pas l’amitié de la Hanse. Je souhaite la mettre au pas. Népotain, son frère, Lanfranc, Daguerre, je les veux voir payer pour leurs années de mauvais service envers le Duché.
Si je suis venu vous voir dans votre Antre, directement, avec ma seule enveloppe d’homme, c’est parce que pour cela, j’ai besoin de votre collaboration. Vous êtes un agent précieux au Duché. Au moins on ne peut pas vous reprocher votre talent. Vous êtes doué pour la contrebande, alors vous êtes contrebandier. Mais les intendants qui sont censés me servir ont fait beaucoup de mal à la Cahogne. Et je suis la Cahogne.
C’est pour cela que je souhaite renégocier les accords que vous aviez jusqu’ici avec vos interlocuteurs. Êtes-vous ouvert à la discussion ? »

Armarius
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeDim 22 Mar - 0:58
Le visage de la Vipère prit un ton un peu plus sérieux.

« Je ne dis pas que je ne gagne rien à vous aider. Ce n'est pas seulement votre intérêt que je défends, mais aussi le mien. Je ne suis ni votre ami ni votre homme-lige. Mais je travaille avec le duché, non pas pour le sire de Saint-Saëns et encore moins pour le sire de Picquy.
- La corruption gangrène l'administration du duché,
intervint Odilon, elle coûte un quart de nos revenus. »

Odilon jeta un œil à son suzerain pour avoir son approbation, puis il continua.

« Nous sommes là pour faire cesser ce fléau. Et pour cela nous avons besoin de faire chuter ceux qui en sont responsables. Nous avons de bonnes raisons de croire que Daguerre et Lanfranc de Picquy sont à la source d'une bonne partie de la corruption, sauf qu'il nous sera difficile d'en avoir la preuve. Mais cette histoire de contrebande avec la Hanse pourrait nous donner l'occasion de provoquer leur chute et de mettre ainsi un terme à ce poison.
- Depuis quand es tu devenu régisseur Odilon ? Tu sais à peine compter.
- J'ai changé et acquis de nouveaux talents depuis...
 »

Odilon s'arrêta. La Vipère esquissa un sourire.

« Depuis que tu étais petit oui.
Je suis fier de voir ce que tu es devenu Odilon. "Chambellan". Je me demande combien d'hommes tu as dû tuer pour atteindre ce poste.
J'aurais aimé garder ces talents près de moi.
 »

Avec la Vipère aussi Odilon semblait avoir un passif, mais bien plus intime qu'avec Rigaud.

« Très bien, sire Eudes, que me proposez vous ? »
Eudes II de Cahogne
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeDim 22 Mar - 14:24
Je lance un regard interrogatif à Odilon, lorsque la Vipère sous-entend qu’il a pu commettre des meurtres pour atteindre la position de chambellan. Le garçon me fascine autant qu’il me terrifie. Je ne l’aurais jamais imaginé être aussi familier avec un truand comme celui qui se tient devant moi.
Je retire mes pieds de la table et me rassois normalement, soudain tout aussi sérieux que mon interlocuteur.

« La contrebande de vin doit cesser, et il me faut obtenir des preuves qui me permettront de faire chanter les responsables, ou alors les condamner devant le Parlement s’ils ne se laissaient pas devenir malléables. Ils doivent bien avoir de la correspondance, des lettres signées, des documents, des choses qui prouvent leurs méfaits.
Bien sûr, j’ai conscience que cette demande vous impacterait directement ; Vous auriez un gros manque à gagner, tant en argent qu’en… Réseaux.
C’est pour cela que j’ai besoin de votre collaboration. Vous servez le Duché, bien ; Si les opérations de contrebande étaient perturbées, par quel autre moyen souhaitez-vous être rétribué ? Je suis sûr qu’il y a un moyen pour que vous gagniez votre vie tout en me servant. »
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeDim 22 Mar - 15:10
« Sire Eudes, la contrebande existera aussi longtemps que les gabelles. Vos sujets chercheront toujours à acheter moins chers en contournant les taxes, et il y en aura toujours un pour leur offrir ce qu'ils veulent, que ce soit moi où un autre.
L'avantage que vous avez aujourd'hui, c'est que vous savez qui contrôle la contrebande. Et vous tirez avantage de cette contrebande, par un réseau d'information à votre service et par la diplomatie qui en découle, comme je vous l'ai dit.
Vous ne pourrez pas faire cesser la contrebande, juste la contrôler, ce que vous faite déjà à travers moi. Si vous voulez jouer contre cette fraude, vous allez perdre plus que moi, et rien ne pourra le compenser.
 »

La Vipère marqua une pause. Puis il se résigna.

« Mais si votre désir est simplement de provoquer la chute d'un notable, comme Lanfranc de Picquy, je peux vous aider à trouver les preuves qu'il vous faut. »
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitimeDim 22 Mar - 22:49
Les arguments de la Vipère font plutôt sens. C’est vrai qu’il vaut mieux avoir un diable qu’on connaît plutôt qu’un diable qu’on ne connaît pas. Au moins avec la Vipère en place, je peux peut-être espérer obtenir les noms de ceux qui agissent dans mon dos.
Du moins, c’est à la condition que la Vipère souhaite bien que je l’apprenne. C’est le soucis avec les espions, ils peuvent tout à fait jouer double-jeu. C’est une situation qui me met fort mal à l’aise. J’en fronce les sourcils, et garde les bras croisés.

« Il faut voir.
Vous aviez dit que vous avez des informations sur le Valais – Dites-moi donc quel est ce renseignement, que j’en juge la valeur. »
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MessageSujet: Re: Le Duc des Ribauds Le Duc des Ribauds  Icon_minitime
Le Duc des Ribauds
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